C’est avec ne satisfaction bien douce, citoyen général, que je vous annonce la fin des dissensions qui déchiraient la partie du Nord, et qui allaient enlever aux chefs vertueux à qui la France doit la conservation de cette précieuse portion de l’île, tout le fruit de leurs glorieux et infatigables travaux. (Villatte était nécessairement compris parmi ces chefs vertueux.)
Des hommes profondément pervers, ceux qui jusqu’à présent ont dirigé les poisons de l’infernale faction Léopardine, étaient parvenus à armer les patriotes contre les patriotes, et leur sang allait peut-être encore rougir cette terre, quand l’agent de la République, le citoyen Roume, conduit par le génie bienfaisant qui veille sur les destinées de la France, est venu mettre fin à nos calamités.
Réunis ici à vos députés, à ceux du général Bauvais et du général Villatte, le citoyen agent de la République, qui s’est convaincu à Paris, du complot affreux qui s’y tramait contre la prospérité de Saint-Domingue, nous a fait connaître la source de nos maux et la cause de nos divisions. Cette source et cette cause se trouvent dans les machinations criminelles de ces méprisables colons, qui, dans la lutte à laquelle ils osèrent provoquer les immortels proclamateurs des droits de l’homme aux Antilles françaises, n’avaient d’autre but que de tuer la liberté et l’égalité à Saint-Domingue.
Frappés de cette vérité, heureux de ne rencontrer parmi nous aucuns coupables, nous nous sommes tous simultanément précipités dans les bras les uns des autres, et avons juré entre les mains de l’agent de la République l’oubli des torts qui ont dû nécessairement résulter de l’erreur fatale dans laquelle nous étions plongés.
Votre républicanisme bien connu, prouvé par tant de travaux et un dévouement si constant à la cause de la République, m’est garant que vous approuverez les mesures conciliatoires auxquelles ont si puissamment contribué vos députés. Salut et fraternité. Perroud.
Certes, cette lettre est irréprochable de tout point ; mais les précédentes, des 10 et 11 mai tenaient un autre langage à Laveaux ; mais bientôt deux écrits de Perroud, publiés au Cap, prouveront de sa part qu’en donnant l’accolade fraternelle aux députés de Rigaud et de Bauvais (espèce de baiser Lamourette, vrai baiser de Judas), cet ordonnateur n’était nullement sincère.