Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 4.djvu/471

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comme T. Louverture agissait alors de concert avec les colons, il faisait fort bien aussi de travailler au rétablissement de l’esclavage des noirs, aboli par ces commissaires civils. Mais, comme il vint ensuite se soumettre à la République française représentée par eux, comme il combattit constamment contre les Anglais, qu’il réussit à chasser de Saint-Domingue avec le concours de tous ses frères, il eut un grand tort par ses succès ; car il est probable qu’à la paix, les Anglais rendant Saint-Domingue comme la Martinique, l’esclavage des noirs y étant maintenu par eux, on n’eût pas eu besoin d’y envoyer une flotte et une armée. Vainement T. Louverture fit-il tous ses règlemens de culture, tous ses autres actes qui rétablissaient de fait l’esclavage des noirs cultivateurs ; les mots de liberté et d’égalité qu’il continuait d’écrire hypocritement dans ses actes, les autres faits qu’on pouvait justement lui reprocher, et surtout sa prétention à gouverner la colonie, lui noir, faisaient sa condamnation aux yeux du Premier Consul[1].


Si nous avons devancé l’ordre chronologique des faits par toutes ces citations, c’est qu’avant de parler de la formidable expédition dirigée contre Saint-Domingue, il nous a paru convenable de bien préciser son caractère, son objet, le but qu’elle se proposait d’atteindre. Aussi, ne sommes-nous pas étonné de trouver, dans le rapport de la commission française présidée par le duc de Broglie

  1. N’oublions pas néanmoins qu’à Sainte-Hélène, suivant Las Cases, l’Empereur Napoléon a flétri les colons « tous royalistes et vendus à la faction anglaise » dont les criailleries ont provoqué l’expédition. Le temps lui avait fait connaître la vérité à leur égard ; mais il était trop tard.