Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 5.djvu/415

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breuse, même en supposant un chiffre inférieur, reconnu par tous les généraux comme leur chef, entouré en ce moment de Gabart, de Cangé et des autres officiers supérieurs, il est impossible qu’il ait souffert une telle scène de la part de celui qu’il visait à abattre, ainsi qu’il en avait agi à l’égard de Sans-Souci. C’eût été s’exposer à perdre le prestige de son autorité aux yeux de tous. Il avait dissimulé envers Sans-Souci en allant le voir dans sa retraite, parce que cet homme paraissait soumis ainsi que Petit-Noël ; il avait dissimulé envers Leclerc, au Cap, parce qu’il pouvait y être arrêté avant son insurrection ; mais on ne peut concevoir qu’étant entouré de son armée, il eût encore dissimulé avec Lamour Dérance : celui-ci n’a pas dû même s’aventurer à se présenter devant lui.

Quoi qu’il en soit, Dessalines s’attacha, par de bons procédés, à gagner les cultivateurs du Cul-de-Sac à la cause indigène : eux et leurs femmes vinrent vendre leurs vivres au camp Frère ; des danses organisées entre les soldats et les femmes achevèrent le plan du général en chef. Naturellement, ce chef dut paraître plus propre à commander, que l’Africain des montagnes de la Selle et du Bahoruco ; et puis, son autorité était appuyée d’une force effective, régulière.

Après ce préalable, il vint au second acte de la résolution qu’il avait prise en voyant la plaine du Cul-de-Sac. Gabart et Cangé se mirent à la tête de deux colonnes pour incendier usines et plantations.

« Son expérience, dit Boisrond Tonnerre, les combats « qu’il avait livrés depuis le commencement de la révolution, lui avaient appris que rien n’est plus fait pour intimider son ennemi que le feu ; tout-à-coup, la plaine,