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avec plus de raison qu’eux, garder les attributions que le sénat avait dû lui déléguer, malgré les termes de la constitution, afin de gouverner la République selon ses idées politiques.

Eh bien ! une lutte semblable ne pouvait-elle pas se produire entre lui, et le sénat et la chambre réunis dans un même esprit, par les mêmes vues ? Dans ce cas, croit-on que Pétion eût sacrifié ses convictions pour céder à ces deux corps ? Il leur eût résisté autant qu’il résista au sénat seul se faisant l’organe de l’opinion générale. Alors, que serait devenue cette prétendue pondération du pouvoir politique ?

Vainement dirait-on qu’une telle hypothèse est inadmissible, à raison de l’influence dominante qu’exerçait Pétion, de la confiance qu’il inspirait par sa sagesse, surtout après la fin de la scission départementale du Sud : en 1817, il se passa entre lui et le sénat un fait qui sera relaté en son temps, dans lequel il fut prouvé que des questions constitutionnelles pouvaient encore occasionner une mésintelligence déplorable[1].

Si Pétion était exposé à se trouver en dissidence avec le sénat dont la composition dépendrait désormais du Président d’Haïti, d’après la constitution revisée, il serait à plus forte raison dans ce cas à l’égard de la chambre des représentans ; car la formation de celle-ci dépendait du peuple, et ses membres, ayant moins d’âge que ceux du sénat, apporteraient naturellement plus de pétulance et d’idées avancées dans l’exercice de leurs fonctions.

Deux conditions étaient posées pour l’élection directe des représentais dans les communes, par les citoyens

  1. À l’occasion de l’élection du sénateur Larose. Cependant, les sénateurs qui firent opposition à Pétion avaient tous été nommés sous son influence.