Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 8.djvu/481

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envisager des éventualités possibles de la part de la France.

Le 19 octobre, pendant que l’armée se mettait en mouvement pour commencer sa marche, un officier vint apporter au Président d’Haïti, une lettre du général de brigade Jérôme, commandant aux Gonaïves, qui faisait sa soumission à la République. Le 20, le président quitta Saint-Marc et se porta aux bords de l’Artibonite, que l’armée allait traverser par le bac Coursaint. Mais là, il apprit que les troupes des Gonaïves montraient un esprit hostile à la soumission de leur général Jérôme : elles y étaient excitées par des officiers que le général Romain y avait envoyés, car Romain espérait pouvoir résister à l’armée républicaine et avait même fait occuper la route de Plaisance par l’Escalier, pour s’opposer à sa marche.

Les troupes mettant beaucoup de temps à passer le fleuve dans le bac Coursaint, Boyer, impatient, le traversa avec une escorte de cavalerie de sa garde, d’environ 50 hommes, et les officiers de son état-major, et commit l’imprudence, non-seulement de s’aventurer ainsi dans une route dont il n’était pas sûr, mais de se porter en toute diligence aux Gonaïves où il trouva deux demi-brigades mutinées, rangées en ligne de bataille sur la place d’armes, et étonnées de voir le Chef de la République pénétrer jusque-là avec une si faible escorte. Comme tous ceux qui la formaient, Boyer reconnut son imprudence ; mais s’armant de courage et de résolution, il harangua ces soldats mutinés par des paroles chaleureuses, en ordonnant de les passer en revue pour recevoir un mois de solde. Heureusement qu’en ce moment, des bâtimens de la République, sous les ordres de Morette, entraient dans le port des Gonaïves au bruit de leur ar-