Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/175

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mission dont il était chargé. Enfin il sut plaire autant à la maîtresse qu’à l’amant. Quand il vit que Sylvie l’écoutait, il lui fit pressentir que, puisqu’elle m’aimait véritablement, elle devait’ne point me rendre malheureux ; que mon père lui donnerait de quoi s’établir ; que tôt ou tard reconnaissant la faute que j’avais faite, je la quitterais ; que le lendemain que nous serions mariés en Espagne, mon père ferait casser notre mariage en France. L’intendante que Crivelly avait mise dans son parti, tenait les mêmes discours.

J’étais destiné à être malheureux ; mon sort influa dans ce moment sur le caractère de Sylvie ; elle se démentit, et me sacrifia à 12,000 livres que mon père lui donna. Crivelly et l’intendante lui firent signer un écrit, par lequel elle se départait de tous ses droits et déclarait ne vouloir pas m’épouser, quand même je le voudrais ; elle rendit en conséquence les promesses et le dédit que je lui avais faits. Je ne pensais à rien moins qu’à cette rupture ; j’avais reçu la veille deux lettres de Sylvie : mon affaire prenait un fort bon train,

Qu’on juge quelle fut ma surprise, lorsque Crivelly me montra la déclaration de Sylvie