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Thérèse

vérité tout à coup de ma paſſion ; mais ils ruinerent enſemble mon tempérament & ma ſanté : je tombai enfin dans un état de langueur, qui me conduiſoit viſiblement au tombeau, lorſque ma mere me retira du Couvent.

Répondez, Théologiens fourbes ou ignorans, qui crées nos crimes à votre gré : Qui eſt-ce qui avoit mis en moi les deux paſſion dont j’étois combattue, l’amour de Dieu & celui du plaiſir de la chair ? Eſt-ce la nature où le Diable ? optez. Mais oſeriez-vous avancer que l’une ou l’autre ſoient plus puiſſans que Dieu ? S’ils lui ſont ſubordonnés, c’eſt donc Dieu, qui avoit permis que ces paſſions fuſſent en moi ; c’étoit ſon ouvrage. Mais, repliquerez-vous, Dieu vous avoit donné la raiſon pour vous éclairer. Oui, mais non pas pour me décider. La raiſon m’avoit bien fait appercevoir les deux paſſions dont j’étois agitée : c’eſt par elle que j’ai conçu par la ſuite que tenant tout de Dieu, je tenois de lui ces paſſions dans toute la force elles étoient ;