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SODOME.

d’un moment, aussi élevé, malgré cette déchéance d’un jour. Pure, cette amitié salie par une faute mortelle ? Élevée et sublime, cette union des cœurs après ce quasi rapprochement des corps ? Oui, pure encore et élevée et sublime, cette alliance de deux âmes qui, un instant, ne purent oublier qu’elles avaient un corps.

De la contrainte et de la gêne entre eux, peut-être ? Non, ils se regardèrent en face : ils se virent s’aimant. Laus était tout l’horizon de Soran.

Sa vie, brisée pour lui, ne pouvait plus être que par lui. Répondait-il à cet amour ? Jacques ne le sut jamais, car ces amours ne peuvent se dire. Il n’y eut en effet entre eux, après cette journée, aucune apparence de ressouvenir, et Soran eût sans doute craint de trouver chez Henri des regrets et des remords, peut-être même le dégoût. Et pourtant, Laus avait compris, et il ne fuyait pas ; il était donc conquis ? Jacques ne voulait pas user de sa victoire. Il songeait que Laus était à lui tout entier, et son amour pour cet enfant, s’augmentant de cette vanité, se satisfaisait ainsi.

Comprenant tout, Henri ne prononçait jamais le nom de la femme de Soran. Apparemment, certaines psychologies sont impénétrables, in-