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Page:Aristide Briand-La Grève générale et la Révolution-1932.djvu/16

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Enfin, jadis, on pouvait inciter le peuple à la révolution. Ces exhortations ne le laissaient pas sceptique ; elles évoquaient à son esprit le souvenir des barricades, des piques, des fusils qu’on se procure au hasard. Quand vous dites à l’opprimé « Révolte-toi ! » il vous montre d’un geste découragé les immenses avenues qui déconseillent la barricade ; il vous demande si vous avez des fusils à lui donner pour répondre à ceux de la bourgeoisie. (Vifs applaudissements et acclamations.)

Conseiller à nos militants de faire la révolution ? Ah ! citoyens, ils en ont bien l’envie, si cela ne dépendait que d’eux, ils seraient bien vite dans la rue. Ils n’y vont pas parce qu’ils prévoient comment ils y seraient reçus… (Vifs applaudissements), parce qu’ils savent bien que leurs efforts seraient noyés dans le sang…

Une Voix. — Comme en 1871 !… (Applaudissements.)

Le citoyen Briand. — Ils comprennent que la révolution de demain, celle qui émancipera le prolétariat, ne peut être efficacement tentée par les vieux procédés révolutionnaires. Non pas, camarades, que je les réprouve. Je suis de ceux qui se feront toujours scrupule de décourager les bonnes volontés sous quelques formes elles se manifestent (Applaudissements.)

Allez à la bataille avec le bulletin de vote si vous le jugez bon, je n’y vois rien à redire. J’y suis allé, moi, comme électeur, j’y suis allé comme candidat, et j’y retournerai sans doute demain. Allez-y avec des piques, des sabres, des pistolets, des fusils : loin de vous désapprouver, je me ferai un devoir, le cas échéant, de prendre une place dans vos rangs. Mais ne découragez pas les travailleurs, quand ils tentent de s’unir pour une action qui leur est propre, à l’efficacité de laquelle ils ont les plus sérieuses raisons de croire. Car enfin, citoyens, la réussite d’une révolution dans l’état actuel des choses, à quoi tient-elle ? (Une voix : À l’anarchie !) Ah ! non,