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Page:Aristophane - Lysistrata (trad. Raoul Vèze), 1928.djvu/46

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interdiraient l’entrée avec des barres et des verrous ?

Hâtons-nous donc le plus possible, Philurge, allons placer autour des portes ces grosses branches, élevons un bûcher, et de nos propres mains, d’un seul cœur, mettons le feu pour les consumer toutes tant qu’elles sont, les misérables comploteuses, et surtout cette Lysistrata, femme de Lycon. Elles ne se moqueront pas de nous, tant que j’aurai un souffle de vie, j’en atteste Déméter. Cléomène lui-même, le roi de Sparte, qui jadis s’était emparé de la citadelle, s’en tira en laissant des plumes ; bien qu’il eût l’arrogance des Lacédémoniens, il dut capituler après m’avoir livré ses armes. Il ne lui restait plus qu’un morceau de manteau usé, il était sale, immonde, hirsute, il ne s’était pas lavé depuis six ans. Je l’avais attaqué furieusement avec une armée rangée sur seize lignes, et je ne quittais jamais les postes, même pour dormir. Et je ne viendrais pas à bout, aujourd’hui, de l’audace impudente de ces femmes, qu’Euripide et tous les dieux eux-mêmes détestent ! S’il en était ainsi, mes trophées ne resteraient pas plus longtemps dans la cité de Pallas.

Mais, pour atteindre au but, il reste à gravir cette pente qui monte à la citadelle ; hâtons-nous, faisons un dernier effort pour porter tous ces bois là-haut sans l’aide même d’un âne. Ces crochets, qui maintiennent les fardeaux, meurtrissent nos épaules ; mais il faut arriver et attiser le feu, prenons garde qu’il ne s’éteigne, faute d’attention, avant que nous soyons au bout.