LIVRE VU, CH. Il, § 10. 2^7
({iiand il en arrive à tromper par le mensonge, ne fait que créer le doute dans l'esprit de l'auditeur. Les sophistes s'attachent à prouver des paradoxes pour faire preuve de grande habileté quand ils y réussissent. Mais le raisonne- ment qu'ils font ne devient qu'une occasion de doute et d'embarras; car la pensée se trouve enchaînée en quel- que sorte, ne pouvant pas s'arrêter h une conclusion qui lui répugne, et ne pouvant point non plus avancer, parce qu'elle ne sait comment résoudre l'argument qu'on lui présente. § 9. On peut donc, en raisonnant de cette sorte, arriver à ce paradoxe, que la déraison mêlée à l'intem- pérance est une vertu. Je m'explique : l'intempérant, aveuglé par le vice qui le domine, fait tout le contraire de ce qu'il pense ; or, s'il pense que certaines choses réelle- ment bonnes sont mauvaises, et que par conséquent il ne faut pas les faire, il fera en définitive le bien et non pas le mal. § 10. Sous un autre point de vue, l'homme qui agit par suite d'une conviction bien précise, et qui pour- suit le plaisir par le libre choix de sa volonté, peut paraître au-dessus de l'honmie qui ne recherche pas le plaisir par suite d'un raisonnement, mais par le seul- effet
��sans doute que le raisonnement fait § 10. L'homme qui agit par suite
par l'intempérant ne sert qu'à l'em- d'une conviction. Celte objection
barrasser davantage encore, loin de contre la doctrine de Platon est ti-ès-
l'éclairer. grave. L'homme qui fait le mal en
§ 9. La déraison... est une vertu, connaissance de cause, vaut mieux
Parce que la déraison alors excuse que celui qui le fait par pure igno-
l'intempérant, qu'elle seule égare. — rance, si la science est, comme on le
liccUcment bonnes sont mauvaises, dit, toute la vertu ; car alors le mé-
C'est un acte de déraison qui mène à chant possède la science, tandis que
bien faire, en évitant ce qu'on croit le l'autre ne sait même pas ce qu'il fait ;
mal. ce qui doit le rendre tout à fait im-
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