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LIVRE IV (7), CHAPITRE VI.

CHAPITRE VI

Suite. Des qualités naturelles que doivent avoir les citoyens dans la république parfaite ; caractères divers des peuples suivant les climats qu’ils habitent ; diversité de leurs institutions politiques. — Supériorité incontestable de la race grecque ; un peuple doit avoir à la fois intelligence et courage ; rôle considérable que joue le cœur dans la vie humaine.

§ 1. Nous avons déterminé plus haut les limites numériques du corps politique ; voyons ici quelles qualités naturelles sont requises dans les membres qui le composent. On peut déjà s’en faire quelque idée en jetant les yeux sur les cités les plus célèbres de la Grèce, et sur les diverses nations qui se partagent la terre[1]. Les peuples qui habitent les climats froids, même dans l’Europe, sont en général pleins de courage. Mais ils sont certainement inférieurs en intelligence et en industrie ; aussi conservent-ils leur liberté ;

  1. Hippocrate est, comme on sait, un des premiers qui aient observé cette influence des climats sur le caractère et les institutions des peuples. Voir le traité des Eaux, des Airs et des Lieux, éd. et trad. de M. Littré, t. II, p. 53. Hippocrate est allé plus loin : il a montré comment les lois à leur tour agissent sur le caractère des peuples ; et il a attribué l’inactivité générale des Asiatiques aux royautés et aux gouvernements despotiques qui pesaient sur eux. Platon a présenté aussi quelques vues sur ce grand sujet, Lois, liv. V, à la fin. Montesquieu, qui a donné dans son ouvrage, liv. XIV, XV, XVI, XVII, une place si considérable à la théorie des climats, n’aurait pas dû passer sous silence les auteurs de l’antiquité qui l’avaient établie avant lui. La théorie des races a succédé, dans notre siècle, à celle des climats, qu’elle modifiera, mais ne détruira point.