Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/389

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à peu près pareil. Car les accès de la colère, les désirs impétueux de l’amour, et autres passions semblables, produisent sur le corps des impressions manifestes qui ressemblent parfois à la folie ; or, c’est évidemment le cas où se trouve l’intempérant. Et tenir, en pareil cas, des discours qui annoncent la science, n’est pas une preuve [qu’on soit dans son bon sens] ; car il y a des gens qui, bien qu’en proie à de pareilles passions, récitent des démonstrations entières et des poèmes d’Empédocle. Les enfants aussi, quand ils commencent à apprendre la langue maternelle, prononcent des phrases, régulières, sans savoir encore ce qu’elles signifient ; car leur intelligence ne peut se développer qu’avec le temps. Ainsi, il faut croire que le langage des hommes intempérants ressemble à celui des acteurs sur le théâtre.

On peut encore considérer physiquement la cause de ce phénomène ; car autre chose est une opinion générale, et une opinion relative à des choses particulières, dont le sentiment seul décide. Or, lorsque toutes deux viennent à coïncider, il faut nécessairement que, d’un côté, l’esprit prononce la conclusion, et que, dans le cas où il y a lieu d’agir, on agisse à l’instant même. Par exemple, s’il faut goûter de tout ce qui a une saveur douce, et si tel objet particulier a une pareille saveur, nécessairement celui que rien n’en empêche, agira sur-le-champ en conséquence de ce raisonnement. Au contraire, lorsque l’opinion générale, qui interdit de goûter des substances sucrées, se trouve