Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/83

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de la liberté expirante, professaient expressément ses dogmes rigides : et, après la chute de la république, sous le despotisme sanguinaire d’un monstre tel que Néron, ces hommes qu’on vit, au milieu de la dégradation universelle et de la plus abjecte servitude, soutenir presque seuls le faix de la dignité humaine, un Thraséas, un Helvidius Priseus, s’étaient formés sur les maximes sévères du Portique. Enfin, c’est à cette même philosophie que l’empire Romain, déjà penchant vers son déclin, dut le bonheur d’être gouverné, pendant près de vingt ans, par le plus sage et le plus vertueux des hommes qui soient jamais montés sur aucun trône, par Marc Aurèle.

Au reste, plus on étudie l’histoire de la doctrine stoïcienne, ou plutôt celle des grands hommes qui en avaient adopté les principes, plus on voit se manifester avec évidence, dans toute leur conduite, les effets de cette sensibilité que, dans la théorie, plusieurs d’entre eux affectaient de méconnaître. Car il ne faut pas s’y tromper ; dans les amês une fois pénétrées de l’amour du beau moral, et chez lesquelles une raison exercée a fortifié cette noble et généreuse passion, le spectacle de l’injustice, de la violation des droits les plus sacrés, des outrages faits à la vertu, produit une souffrance plus insupportable qu’aucune autre. Lorsque l’homme de bien brave les fureurs de la