Page:Aristote - Physique, II (éd. O. Hamelin).djvu/18

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besoins, et que nous-mêmes nous faisons usage de toutes choses en les considérant comme existant en vue de nous. (En effet, nous sommes nous-mêmes des fins en un sens et la chose qu’on a en vue se prend en deux sens, comme nous l’avons dit dans notre ouvrage sur la philosophie). [194b] Il y a donc deux sortes d’arts qui commandent à la matière et, par suite, la connaissent : ce sont, d’une part, les arts qui font usage des choses, et, de l’autre, ceux qui, parmi les arts poétiques, sont architectoniques. Aussi l’art qui fait usage des choses est-il, à sa façon, architectonique, avec cette différence que la première sorte d’arts connaît la forme, tandis que celui des arts, qui est architectonique parmi les arts poétiques, connaît la matière. (En effet, le pilote connaît et prescrit quelle doit être la forme du gouvernail, l’autre artisan de quel bois le gouvernail doit être fait et au moyen de quels mouvements). En somme, toute la différence entre la nature et l’art est que dans les choses naturelles, l’existence en est donnée. Mais, d’un côté comme de l’autre, la connaissance de la fin et celle de la matière ne font qu’un.

Enfin la matière est un relatif, car, autre forme, autre matière.

Maintenant, jusqu’à quel point le physicien doit-il connaître la forme et l’essence ? N’est-ce pas dans la mesure où le médecin connaît les tendons et le fondeur l’airain, c’est-à-dire jusqu’à un certain point ? En effet, toutes les formes naturelles sont en vue de quelque chose et appartiennent à des êtres dont l’essence n’est séparable que spécifiquement et réside dans la matière, puisque c’est, avec le soleil, un homme qui engendre un homme. Quant à la manière d’être et à l’essence de l’être séparé, les déterminer est l’œuvre de la philosophie première.