Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/204

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il faut présenter les arguments dans chaque question de serment prise isolément, on voit aussi comment il faut les présenter lorsque deux questions sont accouplées ; par exemple, si l’on veut bien accepter le serment et que l’on refuse de le déférer ; si on le défère, mais qu’on ne veuille pas l’accepter ; si l’on veut bien et l’accepter et le déférer, et si l’on refuse l’un et l’autre. En effet, les deux questions, ainsi réunies, se composent nécessairement des parties expliquées plus haut, de sorte que les raisons alléguées se composeront, nécessairement aussi, des mêmes arguments.

Si nous avons déjà prêté un serment en contradiction avec le serment actuel, nous alléguerons qu’il n’y a point parjure pour cela ; que, en effet, commettre une injustice est un acte volontaire et que se parjurer c’est commettre une injustice, mais que des actes résultant d’une tromperie ou d’une violence sont indépendants de la volonté.

XXXIII. Il faut donc dire comme conclusion[1], dans cette circonstance, que le parjure réside dans la pensée, mais non sur les lèvres. Si, au contraire, le serment antérieur a été prêté par l’adversaire, on alléguera que celui-là détruit tout ce qui ne s’en tient pas à ce qu’il a juré ; qu’en effet, c’est pour cette raison que l’on n’est chargé d’exécuter les lois qu’après avoir juré de le faire[1] : « Nous prétendons que vous gardiez le serment que vous avez prêté pour juger, et nous, nous ne garderions pas le nôtre ! » On aura recours à cet argument et à toutes sortes d’autres amplifications du même genre.

Voilà tout ce que nous avions à dire sur les preuves indépendantes de l’art.

  1. a et b Nous avons déjà vu, l. I, chap. XI, cet emploi du mot συνάγειν avec ὅτι, qui n’est pas indiqué dans les lexiques.