Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/164

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XXXIX. L’amplification a sa raison d’être dans les louanges ; car elle s’occupe essentiellement de la supériorité ; or la supériorité fait partie des choses belles. Aussi doit-on faire des rapprochements, sinon avec des personnages illustres, du moins avec le commun des hommes, puisque la supériorité semble être la marque d’une vertu.

XL. Généralement parlant, parmi les formes communes à tous les genres de discours, l’amplification est ce qui convient le mieux aux discours démonstratifs ; car ceux-ci mettent en œuvre des actions sur lesquelles on est d’accord, si bien qu’il ne reste plus qu’à nous en développer la grandeur et la beauté ; — les exemples, ce qui convient le mieux aux discours délibératifs ; car nous prononçons nos jugements en nous renseignant sur l’avenir d’après le passé ; — les enthymèmes, ce qui convient le mieux aux discours judiciaires, car le fait accompli, en raison de son caractère obscur[1] admet surtout la mise en cause et la démonstration.

XLI. Voilà donc les éléments d’où se tirent presque tous les genres de louange ou de blâme, les considérations que l’on doit avoir en vue lorsqu’on veut louer ou blâmer, et les motifs qui peuvent donner lieu aux louanges et aux reproches. Une fois en possession de tout cela, on voit clairement où prendre les contraires. En effet, le blâme consiste dans les arguments inverses.

  1. Διὰ τὸ ἀσαφές. Le vieux traducteur latin a διὰ τὸ σαφές, et Buhle, d’après lui ; les deux leçons peuvent se soutenir, suivant le point de vue. Nous adoptons la vulgate.