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XV. Quand ils causent un préjudice, c’est par insolence, mais non par méchanceté. Ils sont enclins à la pitié, parce qu’ils supposent toujours que l’on est honnête et meilleur[1] ; car c’est à leur absence de méchanceté qu’ils mesurent la conduite du prochain et, par suite, ils supposent que celui-ci ne mérite pas le sort qu’il éprouve.

XVI. Ils aiment à rire, et c’est pour cela qu’ils plaisantent, car la plaisanterie est une impertinence polie.

Tel est le caractère des jeunes gens.


CHAPITRE XIII

Des mœurs de la vieillesse.

I. Les vieillards et ceux qui ont passé l’âge mûr ont des traits de caractère empruntés, pour la plupart, aux contraires de ceux qui précèdent. Comme ils ont vécu de longues années ; que, le plus souvent, ils ont été abusés ; qu’ils ont commis des fautes ; que les actions humaines pour la plupart sont mauvaises, ils n’affirment rien et, en toute chose, ils agissent moins qu’il ne faut.

II. Ils croient, ils ne savent pas ; et, quand on discute, ils ajoutent : peut-être, en effet, sans doute ; ils s’expriment sur toute chose de cette façon, et sur rien avec assurance.

III. Ils sont malicieux ; car c’est de la malice que de supposer en tout de mauvaises intentions ; ils sont enclins aux soupçons à cause de leur manque de confiance, et ils manquent de confiance, parce qu’ils ont de l’expérience.

  1. Ou meilleur que l’on n’est, ou, plutôt trop bon poux mériter le sort qui fait pitié.