Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/301

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lois, comme on lui répondait par des rumeurs tumultueuse : « Les lois, dit-il, ont besoin d’une autre loi qui les corrige, car les poissons ont besoin de sel, et cependant il n’est pas vraisemblable, ni probable que, vivant dans l’eau salée, ils aient besoin de sel, et les olives, d’huile, et cependant, il est incroyable que ce qui sert à faire l’huile ait besoin d’huile. »

XXIII. Un autre lieu propre à la réfutation consiste à examiner les faits qui ne concordent pas, pour voir si cette discordance leur vient de diverses circonstances, actions et paroles quelconques, en considérant séparément la situation de son contradicteur ; par exemple : « Il dit qu’il est votre ami, mais il a prêté serment aux Trente ; » - ou la sienne propre : « Il dit que j’aime les procès, mais il ne peut démontrer que j’en aie provoqué un seul ; » - ou enfin, celle du contradicteur et la sienne propre : « Il n’a jamais prêté d’argent, lui, et moi, j’ai libéré (de leurs dettes) beaucoup d’entre vous. »

XXIV. Un autre lieu, c’est de répondre à des imputations, ou à des faits d’un caractère calomnieux, produits antérieurement et donnant le change, en expliquant la raison d’être du fait qui a paru étrange ; car il a fallu quelque chose qui fit naître cette calomnie. Exemple : (une mère) dont une autre femme a ravi le fils par substitution[1] semblait, en raison des caresses qu’elle prodiguait au jeune homme (repris par elle), avoir avec lui une liaison intime. Son motif exposé[2],

  1. Nous adoptons, avec Spengel, la leçon du manuscrit de Paris 1741 : ὑποβεβλημένης τινὸς τὸν αὑτῆς υἱόν. La leçon de plusieurs autres manuscrits et de la traduction latine : διαβεβλημένης πρὸς τὸν αὑτῆς υἱόν rend compte des traductions éloignées de la nôtre que nous empruntons à Dobree (Adversaria, t. 1er , p. 138, éd. de G. Wagner), et qu’admettrait volontiers M. R. Dareste.
  2. C’est-à-dire comme on apprit que c’étaient une mère et son fils, non pas un amant et sa maîtresse.