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celle qui affaiblit l’importance du bien ou du mal. C’est ainsi qu’Aristophane emploie, en manière de plaisanterie, dans les Babyloniens, le terme de miette d’or pour or, petit vêtement pour vêtement, petite injure pour injure, petite maladie pour maladie. Seulement il faut user avec prudence des diminutifs et observer une juste mesure dans l’emploi de l’un ou de l’autre terme[1].


CHAPITRE III


Sur le style froid.


I. Les expressions sont froides, quant au style, dans quatre cas différents. D’abord dans celui des mots composés. Exemple : Lycophron[2] dit : le ciel πολυπρόσωπος; (aux nombreuses faces), la terre, μεγαλοκόρυφος (aux grandes cimes), une rade στενόπορος (à l’entrée étroite)[3]. Gorgias disait : un flatteur πτωχόμουσος (artiste en fait de mendicité) ; il a employé aussi les mots ἐπιορκήσαντας (ceux qui se sont parjurés) et κατευορκήσαντας (ceux qui ont contre-juré la vérité)[4]. Alcidamas : « l’âme remplie de courroux, et la face devenue πυρίχρων (rouge comme du feu) ; » il pensait que son ardeur leur serait τελεσφόρος (les emporterait vers leur but); il faisait de la persuasion le τελεσφόρος des discours (l’agent qui mène au but); il nommait κυανύχρων cou-

  1. Le terme propre et son diminutif.
  2. Il s’agit du sophiste de ce nom. Cp. Soph. elench., chap. XV.
  3. Ἀκτἡ στενόπορος. La traduction littérale « un rivage au passage étroit » ne fait aucun sens.
  4. Κατά τινος εὐορκήσαντας dit Étienne.