Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/82

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VI. En effet, la glose, la métaphore, l’ornement et les autres formes précitées ôteront au style la vulgarité et la bassesse ; le terme propre lui donnera de la clarté.

VII. Une chose qui contribuera grandement à la clarté et à l’élévation du style, ce sont les allongements, les apocopes (coupures) et les altérations (des noms) ; car (un mot), présenté comme forme insolite, perdra de sa vulgarité en devenant autre que le terme propre, tandis que la clarté d’un terme aura pour cause sa participation à la propriété d’expression.

VIII. Aussi c’est faire un reproche mal fondé que de critiquer un tel mode de langage et de tourner en ridicule le poète qui l’emploie ; comme Euclide l’Ancien, qui prétendait qu’il était facile de faire de la poésie, du moment que l’on accordait aux poètes la faculté d’allonger (les noms) autant qu’ils le veulent et qui les raillait en citant ce vers :

Je vis Épicharès marcher sur Marathon…[1]

et cet autre :

Lui qui n’aurait pas aimé son ellébore…[2]

IX. Il serait ridicule d’employer ce procédé d’une façon quelconque, et la mesure doit être gardée dans toutes les parties ; en effet, se servir des métaphores, des gloses et des autres formes sans observer la convenance, ou s’appliquer à faire rire, ce serait aboutir au même résultat.


    vieux manuscrit de Paris donne κεκρῖσθαι, qui se rapproche de notre lecture, vu l’iotacisme.

  1. Épicharès, conjecture de Tyrwhitt. — M. Egger lit : ἥνικ’ Ἄρην, d’après Duntzer. Le vieux manuscrit parisien donne : ἤτει χάριν ; d’autres manuscrits : ἤτ… χάριν, εἴτι χάριν, εἴ τι χάριεν, etc.
  2. Ce vers est tout aussi mutilé que le précédent.