Page:Aristote - Traités des parties des animaux et de la marche des animaux, tome I, 1885.djvu/263

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§ 29[1]. Il est donc bien clair que le naturaliste n’a point à étudier l’âme tout entière ; car ce n’est pas l’âme entière qui constitue la nature de l’animal ; c’est une de ses parties uniquement, ou peut-être plusieurs de ses parties. Ce qui est tout aussi certain, c’est que l’histoire naturelle n’a jamais à étudier des choses abstraites, puisque la nature fait tout ce qu’elle fait en vue d’une fin spéciale. Il semble en effet que de même qu’au fond des productions de l’art, il y a toujours l’art, de même aussi dans les choses mêmes de la nature, il doit y avoir quelque autre cause, quelque autre principe de même genre que nous tirons du Tout, par abstraction, comme nous en tirons la chaleur et le froid. § 30[2]. Ce serait donc à une telle cause qu’il faudrait vraisemblablement rapporter l’origine du monde, s’il a toutefois une origine, bien plutôt que

  1. Qui constitue la nature de l’animal. Le texte dit simplement : « qui est nature ». J’ai cru devoir préciser davantage les choses, et rapporter ceci au sujet même de ce Traité des Parties, c’est-à-dire, la nature spéciale et propre de l’animal. La suite de la pensée semble exiger cette interprétation. — Des choses abstraites. Cette théorie est parfaitement vraie, et la science de l’histoire naturelle se fonde avant tout et exclusivement sur l’observation ; voir la Préface à l’Histoire des Animaux, p. CXIV. — La nature… en vue d’une fin spéciale. Aristote n’a jamais hésité sur ce grand principe des causes finales ; et il l’a répété sous toutes les formes. Cuvier l’a soutenu non moins constamment ; voir encore la Préface à l’Histoire des Animaux, p. CLIX. — Il y a toujours l’art. Plus haut, § 16, Aristote a dit que l’art est la raison de l’œuvre sans la matière. — Quelque autre cause. La cause même de l’univers, que nous induisons de l’observation des choses prises et étudiées dans leur totalité.
  2. L’origine du monde. Voir dans la Métaphysique, liv. XII, ch. VII, § 5, p. 184, et ch. X, p. 209, de ma traduction. — L’origine des êtres mortels. On peut ici n’être pas d’accord avec Aristote ; et il semble en outre qu’il n’est pas tout à fait d’accord avec lui-même, puisque dans la Métaphysique, liv. XII, ch. X, § 2, p. 210, il déclare que tout dans l’univers est soumis à un seul et unique principe, et que tous les êtres mortels, poissons, volatiles et plantes, font partie d’un seul et même ordre. — C’est le changement. Opinion profondément vraie ; elle n’a plus rien de neuf pour nous ; mais du temps d’Aristote, elle devait paraître très-nouvelle et très-frappante. — Nos philosophes. Le texte est un peu plus vague. — Grâce à la nature. C’est prêter à la nature une indépendance qu’elle n’a pas. Dans les animaux aussi bien que dans tout le reste, la nature est soumise à une loi supérieure. — Le monde s’est constitué… au hasard. Aristote a toujours combattu cette explication de l’origine des choses ; et voilà pourquoi il a tant admiré Anaxagore, plaçant l’Intelligence au-dessus de tous les principes purement matériels que les philosophes invoquaient avant lui. — Rien n’est sujet au désordre. Sous une autre forme, c’est le « Cœli enarrnnt gloriam Dei ». Le sens commun est en ceci d’accord avec la philosophie ; et la science est bien aveugle quand elle se met en opposition avec cette unanimité du genre humain et des sages. Voir la Préface à l’Histoire des Animaux, p. CLXVII