Page:Aristote Metaphysique 1840 2.djvu/112

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science. Oui, sans doute, celui qui étudie ne possède pas encore la science. Mais de même que dans toute production il existe déjà quelque chose de produit, que dans tout mouvement il y a déjà un mouvement accompli (et nous l’avons démontré dans notre traité sur le mouvement[1], de même aussi il faut nécessairement que celui qui étudie, possède déjà quelques éléments de la science. Il résulte de ce qui précède que, dans ce sens, l’acte est antérieur à la puissance, et sous le rapport de la production, et sous le rapport du temps.

Il est aussi antérieur sous le rapport de la substance : d’abord parce que ce qui est postérieur quant à la production est antérieur quant à la forme et à la substance : ainsi, l’homme fait est antérieur à l’enfant, l’homme est antérieur au sperme, car l’un a déjà la forme, l’autre ne l’a point ; ensuite parce que tout ce qui se produit tend à un principe et à un but, car la cause finale est un principe, et la production a pour but ce principe. L’acte aussi est un but ; et la puissance est en vue de ce but. En effet, les animaux ne voient pas pour avoir la vue, mais ils ont la vue pour voir ; de même on possède l’art de bâtir pour bâtir, la science spéculative pour s’élever à la spéculation ; mais on ne s’élève pas à la spéculation pour posséder la science, sinon lorsqu’on apprend : encore dans ce dernier cas n’y a-t-il réellement pas spéculation ; il

  1. Ἐν τοῖς περὶ κινήσεως. Aristote désigne par cette expression la Physique, et plus spécialement le livre VI, 5, de ce traité, Bekker, p. 235, où il examine cette question, à propos de la théorie générale du mouvement.