Page:Aristote Metaphysique 1840 2.djvu/177

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qu’il y a production du non-blanc, le non-blanc, selon eux, proviendrait de ce qui est non-blanc ; d’où il suit, dans l’hypothèse, que quelque chose viendrait du non-être ; à moins que le même objet ne soit à la fois blanc et non-blanc. Cette difficulté est aisée à résoudre. Nous avons dit dans la Physique[1], comment ce qui est produit vient du non-être, et comment de l’être. D’un autre côté, ajouter également foi aux opinions, aux imaginations de ceux qui sont en désaccord sur les mêmes objets, c’est pure sottise. Évidemment, il faut de toute nécessité que les uns ou les autres soient dans l’erreur : cette vérité se montrera dans tout son jour, si l’on considère ce qui a lieu dans la connaissance sensible. Jamais, en effet, la même chose ne paraît douce aux uns, amère aux autres, à moins que pour les uns, le sens, l’organe qui juge des saveurs en question, ne soit vicié et altéré. Mais s’il en est ainsi, il faut admettre que les uns sont, et que les autres ne sont pas la mesure des choses. Ce que je dis, je le dis également pour le bien et le mal, le beau et le laid, et les autres objets de ce genre.

Professer l’opinion dont il s’agit, c’est croire que les choses sont telles qu’elles paraissent à ceux qui compriment la paupière inférieure avec le doigt et font ainsi qu’un objet unique leur paraît double ; c’est croire qu’il y a deux objets parce qu’on en voit deux, et qu’ensuite il n’y en a plus qu’un, car ceux qui ne touchent pas leur œil, n’en voient qu’un seul. Et d’ailleurs il est absurde de porter un jugement sur la vérité, d’après les

  1. Voyez Phys, auscult., I, 7 ; Bekk., p. 189 sqq.