Page:Aristote Metaphysique 1840 2.djvu/211

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contraire, il y a nécessairement un sujet qui subit le changement du contraire au contraire, car ce ne sont point les contraires eux-mêmes qui changent. De plus, ce sujet persiste après ce changement, tandis que le contraire ne persiste pas. Il y a donc, outre les contraires, un troisième terme, la matière. Il y a quatre sortes de changement : changement d’essence, de qualité, de quantité, de lieu. Le changement d’essence, c’est la production et la destruction proprement dites ; le changement de quantité, l’augmentation et la diminution ; le changement de qualité, l’altération ; le changement de lieu, le mouvement. Le changement doit donc se faire entre des contraires de la même espèce[1], et il faut que la matière, pour changer de l’un à l’autre, les ait tous deux en puissance. Il y a deux sortes d’être, l’être en puissance et l’être en acte ; tout changement se fait donc de l’un à l’autre : ainsi du blanc en puissance au blanc en acte. De même pour l’augmentation et la diminution. Il suit de là que ce n’est pas toujours accidentellement qu’une chose provient du non-être. Tout provient de l’être, mais, sans doute, de l’être en puissance, c’est-à-dire du non-être en acte ; c’est là l’unité d’Anaxagore, car ce terme exprime mieux sa pensée que les mots : Tout était ensemble ; c’est là le mélange[2] d’Empédocle et d’Anaximandre[3] ; c’est là ce que dit

  1. Littéralement : Sur les contrariétés d’individu à individu : εἰς ἐνατιώσεις τὰς καθ’ ἔκαστον.
  2. Μίγμα. C’est l’unité ou le Dieu dont il est question ailleurs, et qu’Empédocle appelait σφαῖρος. Voyez liv. III, 4, t. I, p. 89-90.
  3. Voyez liv. I, 6, t. I, p. 34, et Phys. liv.I, 4 ; Bekk., p. 187.