Page:Aristote Metaphysique 1840 2.djvu/331

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che quelle est la substance première ; il ne saurait donc la trouver dans ce qui est composé, car ce qui est composé est postérieur à ses éléments. On n’a pas besoin d’ailleurs d’entrer en discussion sur une chose perçue immédiatement par les sens, et dont toutes les qualités, tous les caractères se révèlent à nous d’eux-mêmes. Les mots φανερὰ δέ πως καὶ ἡ ὕλη, n’ont rien non plus qui doive étonner. Aristote ne dit pas absolument que la matière tombe sous le sens ; il met une restriction : elle y tombe jusqu’à un certain point. Il est évident que la matière, laquelle n’a ni forme, ni quantité, ni qualité, ni rien, en un mot, de ce qui détermine l’être, la matière considérée comme simple possibilité d’existence, échappe à la prise immédiate des sens. Mais il y a une induction, ou, comme dit Aristote au liv. I de la Physique, une analogie qui nous aide à la saisir. La matière a, pour Aristote, des degrés différents ; car il y a dans l’indétermination des degrés, du plus ou du moins. La matière première est à la matière seconde comme celle-ci est à la troisième, comme la troisième à une autre, s’il y en a une autre : la statue sujet, matière de certaines qualités, a pour matière, la matière des corps fusibles ; pour prendre un exemple qu’affectionne Aristote. Or, nous percevons directement la statue ; nous percevons l’airain ; et par analogie, par induction, si l’on veut, nous connaissons la matière de l’airain. Voilà avec quelles restrictions Aristote a dit que la matière tombe sous le sens. Admettons que tel est son caractère ; il faut bien alors commencer par le point sur lequel il y a le plus de contestation. Sur la matière on s’accorde à peu près, au moins en principe, et Aristote l’a abondamment prouvé dans le livre premier de la Métaphysique. Pour la forme, il n’en est pas ainsi : si l’on nie que la forme existe par elle-même, on nie qu’elle soit une essence. Il faut examiner quels sont ses caractères véritables ; ils ne sa manifestent pas d’eux-mêmes aux yeux, ils sont difficiles à découvrir : ἀπορωτάτη. Voyez sur ce passage, Alexandre d’Aphrodisée, Schol., p. 741, Sepulv., p. 183 ; Philop., fol. 26, a ; et aussi St. Thomas, fol. 87, a.