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Page:Armagnac - Quinze Jours de campagne, 1889.djvu/90

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pluies récentes avaient encrassé et rouillé les fusils, ils les avaient démontés, en nettoyaient et en séchaient les pièces autour des feux de bivouac. Les canons n’étaient pas attelés, on avait conduit les chevaux à l’abreuvoir ; enfin le camp français était plongé dans la sécurité la plus complète, lorsqu’il fut tout à coup inondé d’obus et couvert de mitraille.

L’artillerie bavaroise, qui s’était installée tranquillement auprès de la ferme de la Petite-Forêt, à 400 mètres de nous, venait d’ouvrir le feu.

Uhlans en vedette ou en reconnaissance

Arrivée silencieusement par les bois, la colonne bavaroise avait l’ordre de rester cachée et de ne pas agir avant que les autres corps eussent débouché de la forêt par d’autres chemins, pour entreprendre une attaque d’ensemble ; mais la partie lui parut trop belle, et, sans attendre un instant l’arrivée des autres colonnes, elle déploya quelques tirailleurs dans les bois et disposa ses batteries d’avant-garde de manière à profiter immédiatement de l’avantage de la surprise. Elle avait pu arriver à 400 mètres de nous et s’y établir ! Comme à Wissembourg, comme en cent rencontres de cette guerre funeste, pas une patrouille, pas une grand’garde, pas une sentinelle avancée pour veiller au salut de l’armée !

Un désordre inouï, une confusion indescriptible, règnent chez ces hommes désarmés à cette attaque inattendue. Les officiers cherchent partout leurs troupes, les soldats demandent où sont leurs officiers. Peu à peu cependant le calme renaît, les, soldats remontent leurs fusils à la hâte, les officiers, redevenus de sang-froid, les rallient et lancent les premiers prêts sur l’artillerie ennemie, qui, en raison de sa proximité, fait rapidement de grandes pertes et voit le nombre de ses servants réduit à trois par pièce. On attelle les canons, les batteries françaises prennent position et éprouvent cruellement les Allemands en marche en envoyant leurs obus sous bois ; mais des renforts arrivent sans cesse à l’ennemi, et lorsqu’à une heure le corps français, enfin complètement rallié, dessine une attaque vigoureuse, les Allemands appellent leurs bataillons de réserve qui couronnent les hauteurs tout en restant à l’abri dans les bois. Nos soldats, accueillis par des feux de salve et à volonté, sont décimés et obligés de reculer.