Page:Armagnac - Quinze Jours de campagne, 1889.djvu/89

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Les troupes du général de Failly étaient arrivées à Beaumont, pendant la nuit du 29 au 30, après une marche des plus pénibles dans des chemins défoncés ; l’arrière-garde ne parvint au campement qu’à 5 heures du matin ; les hommes étaient épuisés. Le général jugea nécessaire de leur accorder un long repos et décida, contrairement aux ordres du quartier général, qu’on ne lèverait le camp qu’assez tard dans la matinée. Le maréchal, parti de grand matin de Raucourt pour se rendre à Mouzon, fit un détour et passa à 7 heures et demie à Beaumont. Étonné d’y trouver au repos le 5e corps, qui devait en effet, d’après ses instructions, quitter Beaumont entre 6 et 7 heures pour traverser la Meuse, il fit appeler le général de Failly, qui était encore couché. On le réveilla, et le maréchal lui reprocha de n’avoir pas exécuté ses ordres. Le général prétexta la fatigue de ses troupes et assura que le camp serait levé vers 9 heures.

À midi, les troupes occupaient encore les positions où elles avaient été établies, de la manière la plus imprévoyante, au sud et au nord du village. Au lieu d’occuper ou, tout au moins, de garder les hauteurs, ce qui eût été de la prudence la plus élémentaire, les régiments étaient cantonnés dans un espace étroit compris entre la Meuse et l’Yoncq, ruisseau qui va se jeter dans le fleuve à Mouzon, au pied de collines qui les dominaient de toutes parts et qui sont couvertes de bois très fourrés où les routes seules sont praticables. L’état-major déjeunait tranquillement chez le maire, sourd aux avertissements répétés que des gens du pays venaient sans cesse lui donner de rapproche de l’ennemi. Les officiers de tous grades étaient à table ou se promenaient dans le village en causant et en fumant. Les soldats faisaient la soupe, et, comme les