Page:Arnauld et Nicole - Logique de Port-Royal, Belin, 1878.djvu/225

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Je dis, en second lieu, que roi, qui est le moyen, n’est point attribut dans cette proposition, la loi divine commande d’honorer les rois, quoiqu’il soit joint à l’attribut commande, ce qui est bien différent ; car ce qui est véritablement attribut est affirmé et convient : or, 1o roi n’est point affirmé, et ne convient point à la loi de Dieu ; 2o l’attribut est restreint par le sujet : or, le mot de roi n’est point restreint dans cette proposition, la loi divine commande d’honorer les rois, puisqu’il se prend généralement.

Mais si l’on demande ce qu’il est donc, il est facile de répondre qu’il est sujet d’une autre proposition enveloppée dans celle-là ; car, quand je dis que la loi divine commande d’honorer les rois, comme j’attribue à la loi de commander, j’attribue aussi l’honneur aux rois, car c’est comme si je disais : la loi divine commande que les rois soient honorés.

De même, dans cette conclusion, la loi divine commande d’honorer Louis XIV, Louis XIV n’est point l’attribut, quoique joint à l’attribut, et il est, au contraire, le sujet de la proposition enveloppée ; car c’est autant que si je disais : la loi divine commande que Louis XIV soit honoré.

Ainsi, ces propositions étant développées en cette manière :

La loi divine commande que les rois soient honorés ;

Louis XIV est roi :

Donc la loi divine commande que Louis XIV soit honoré ;

il est clair que tout l’argument consiste dans ces propositions :

Les rois doivent être honorés ;

Louis XIV est roi :

Donc Louis XIV doit être honoré ;

et que cette proposition, la loi divine commande, qui paraissait la principale, n’est qu’une proposition incidente à cet argument, qui est jointe à l’affirmation à qui la loi divine sert de preuve.

Il est clair de même que cet argument est de la première figure en Barbara, les termes singuliers, comme Louis XIV, passant pour universels, parce qu’ils sont pris dans toute leur étendue, comme nous avons déjà remarqué.

Exemple II. Par la même raison, cet argument, qui paraît de la deuxième figure et conforme aux règles de cette figure, ne vaut rien :

Nous devons croire l’Écriture ;

La tradition n’est point l’Écriture :

Donc nous ne devons point croire la tradition.

Car il doit se réduire à la première figure, comme s’il y avait :

L’Écriture doit être crue ;

La tradition n’est point l’Écriture :

Donc la tradition ne doit pas être crue.

Or, l’on ne peut rien conclure dans la première figure d’une mineure négative.

Exemple III. Il y a d’autres arguments dont les propositions paraissent de pures affirmatives dans la deuxième figure, et qui ne laissent pas d’être fort bons, comme :