Page:Arnauld et Nicole - Logique de Port-Royal, Belin, 1878.djvu/383

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

D’un enfant mort sans baptême dont la mère obtint la résurrection par les prières qu’elle en fit à saint Étienne, en lui disant avec une grande foi : Saint martyr, rendez-moi mon fils. Vous savez que je ne demande sa vie qu’afin qu’il ne soit pas éternellement séparé de Dieu. Ce que ce saint rapporte comme une chose dont il était très-assuré, dans un sermon qu’il fit à son peuple, sur le sujet d’un autre miracle très-insigne qui venait d’arriver en ce moment-là même dans l’église où il prêchait, lequel il décrit fort au long dans cet endroit de la Cité de Dieu.

Il dit que sept frères et trois sœurs, d’une honnête famille de Césarée en Cappadoce, ayant été maudits par leur mère pour une injure qu’ils lui avaient faite, Dieu les avait punis de cette peine, qu’ils étaient continuellement agités, et dans le sommeil même, par un horrible tremblement de tout le corps : ce qui était si difforme, que, ne pouvant plus souffrir la vue des personnes de leur connaissance, ils avaient tous quitté leur pays pour s’en aller de divers côtés, et qu’ainsi l’un de ces frères, appelé Paul, et l’une de ces sœurs, appelée Palladie, étaient venus à Hippone, et s’étant fait remarquer par toute la ville, on avait appris d’eux la cause de leur malheur ; que le propre jour de Pâques, le frère, priant Dieu devant les barreaux de la chapelle de Saint-Étienne, tomba tout d’un coup dans un assoupissement pendant lequel on s’aperçut qu’il ne tremblait plus ; et s’étant réveillé parfaitement sain, il se fit dans l’église un grand bruit du peuple, qui louait Dieu de ce miracle et qui courait à saint Augustin, lequel se préparait à dire la messe, pour l’avertir de ce qui s’était passé.

« Après, dit-il, que les cris de réjouissance furent passés et que l’Écriture sainte eut été lue, je leur dis peu de chose sur la fête et sur ce grand sujet de joie, parce que j’aimai mieux leur laisser, non pas entendre, mais considérer l’éloquence de Dieu dans cet ouvrage divin. Je menai ensuite chez moi le frère qui avait été guéri ; je lui fis conter toute son histoire, je l’obligeai de l’écrire, et le lendemain je promis au peuple que je la lui ferais réciter le jour d’après. Ainsi le troisième jour d’après Pâques, ayant fait mettre le frère et la sœur sur les degrés du jubé, afin que tout le peuple pût voir dans la sœur, qui avait encore cet horrible tremblement, de quel mal le frère avait été délivré par la bonté de Dieu, je fis lire le récit de leur histoire devant le peuple, et je les laissai aller. Je commençai alors à prêcher sur ce sujet (on a le sermon, qui est le 423e), et tout d’un coup, lorsque je parlais encore, un grand cri de joie s’élève du côté de la chapelle, et on m’amène la sœur, qui, étant sortie de devant moi, y était allée et y avait été parfaitement guérie en la même manière que son frère ; ce qui causa une telle joie parmi le peuple, qu’à peine pouvait-on supporter le bruit qu’ils faisaient. »

J’ai voulu rapporter toutes les particularités de ce miracle pour convaincre les plus incrédules qu’il y aurait de la folie à le révoquer en doute, aussi bien que tant d’autres que ce saint raconte au même endroit ; car, supposé que les choses soient arrivées comme il le rapporte,