Page:Arnauld et Nicole - Logique de Port-Royal, Belin, 1878.djvu/399

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

logique de l’induction n’en est pas moins la substitution, au moyen terme, de la somme totale des individualités qui composent son extension. Cette condition réalisée, le petit terme et le moyen peuvent se convertir l’un dans l’autre. La mineure tourne sur elle-même ; les deux autres propositions, sans tourner sur elles-mêmes, tournent autour de la mineure, afin de présenter à ses deux faces les mêmes faces qu’auparavant : la conclusion se trouve en tête, la majeure à la fin, à la place de la conclusion (au lieu de A en B, B en C, A en C, on a : A en C, C en B, A en B). Ainsi l’induction est un syllogisme sans moyen terme, où le petit extrême tient lieu du moyen terme, et où la conclusion devient la majeure et la majeure la conclusion.

La démonstration et l’induction s’opposent donc, comme la méthode qui descend des principes aux conséquences et la méthode qui s’élève des conséquences aux principes ; en outre, si toute démonstration suppose une majeure, et s’il est impossible que la preuve remonte à l’infini, toute démonstration dérive d’une majeure indémontrable. Toutes les majeures intermédiaires peuvent donc être trouvées indifféremment par l’induction ou la déduction ; mais la première majeure en chaque genre ne peut être trouvée logiquement que par l’induction. De son côté, l’induction suppose pour fondement, en dernière analyse, une conclusion élémentaire qui ne puisse pas être la conséquence d’une induction antécédente : cette conclusion ne peut être trouvée logiquement que par démonstration. La démonstration et l’induction sont donc les deux méthodes opposées qui vont, l’une des premiers principes aux dernières conséquences, l’autre des dernières conséquences aux premiers principes. Le point de départ de la première est le genre, et le terme auquel elle arrive, à travers toute la suite des espèces, l’individu : l’individu est le point de départ de la seconde, et le genre sont point d’arrivée. L’une va du général au particulier, l’autre du particulier au général.

La science ne tourne pas pour cela dans un cercle ; la démonstration est la première dans l’ordre logique, l’induction dans l’ordre du temps. La démonstration est la forme essentielle de la science ; l’induction, qui doit s’y ramener, la forme accidentelle sous laquelle il nous faut saisir d’abord les éléments. Celle-là est plus claire en elle-même ; celle-ci plus claire pour nous. Ce qu’il y a de plus évident en soi,