matériel, qui lui a été inspiré par son tempérament de poète, est le signe extérieur de la différence essentielle des deux inspirations. Racan n’a pas craint d’affronter la grande strophe alexandrine, parce qu’il avait à y verser de larges et harmonieuses périodes exprimant les forts sentiments dont il avait l’âme remplie.
Il est poète lui aussi, non parce que son imagination se joue dans la nature et la peuple de gracieux fantômes mythologiques, mais simplement parce qu’il recueille en ses vers la poésie qui monte naturellement de la terre remuée par l’homme, comme la rosée aux matins d’été, et cette simplicité même fait la beauté et le prix de son inspiration. N’y a-t-il pas entre ces deux tableaux champêtres quelque chose de la différence qui sépare en peinture Corot de Rosa Bonheur ?
Bien des éléments étrangers, somme toute,
entrent dans la composition des Stances ; l’on a
remarqué que c’est la loi de presque toutes les
œuvres vraiment originales, et, pour faire sa
pièce, Racan, sans se cacher, a puisé à pleines
mains dans Virgile, dans Horace, dans Claudien
et dans Desportes, leur empruntant des idées,
des sentiments, des mots, des images et presque
des vers ; l’on ne doit point le regretter, car son
manque de culture première et sa paresse natu-