III
MALHERBE PÉDAGOGUE.
À peine installé à Paris, le nouveau venu de
Provence fut invité à la table hospitalière de Desportes,
qu’il connaissait de longue date et qu’il
avait commencé par imiter. Avec leurs neuf années
seulement de distance, ils étaient de complexion
totalement différente : l’un apportait une verdeur
et une énergie restées longtemps sans emploi et
maintenant impatientes de se produire ; l’autre
vieillissait en paix, venant de mettre la dernière
main à une nouvelle édition de ses Psaumes et
jouissant de la considération générale des poètes,
qu’il continuait à traiter grandement dans sa maison
de Vanves. Malherbe s’y rendit donc en compagnie
de Mathurin Régnier, neveu de l’amphitryon.
Desportes le reçut, à son ordinaire, « avec
grande civilité » : le potage était servi, mais soudain
le vieux poète songe à offrir à son hôte un
exemplaire de sa nouvelle édition des Psaumes et
se met en devoir de monter en sa chambre pour
l’aller quérir. « Je les ai déjà vus, réplique Malherbe,
cela ne vaut pas que vous preniez la
peine de remonter, et votre potage vaut mieux
que vos Psaumes. »
Desportes était trop courtois pour relever la