des leçons de cette seconde édition soient nettement préférables ; et comment expliquer, dans cette hypothèse, la note qui se trouve en tête du manuscrit : Donné à l’imprimeur le 5 aoûst ?
Ces deux hypothèses étant rejetées, voici celle que nous proposons et que nous essaierons ensuite de justifier. Selon nous, d’Aubigné n’a remanié qu’une seule fois le texte des Tragiques : ce travail de revision est représenté par le manuscrit de Bessinges. Puis, pour faciliter la tâche de l’imprimeur et sans doute à la demande de celui-ci, il transporta sur un exemplaire de 1616 les additions du manuscrit et les leçons nouvelles, sans s’interdire d’ailleurs de les modifier ou de revenir à son texte primitif, lorsqu’il le jugeait à propos. On s’explique d’ailleurs aisément que des omissions et des confusions aient pu se produire au cours de ce travail. L’édition s. l. n. d. représente donc le dernier état du texte, et la base d’une édition critique des Tragiques doit être, non pas le manuscrit, mais l’édition s. l. n. d.[1], le manuscrit ne devant être employé que pour réparer les fautes de l’imprimeur ou les distractions de l’auteur.
Un premier avantage de cette hypothèse est d’expliquer très clairement la mention Donné à l’imprimeur le 5 aoûst, qui était restée jusqu’ici inintelligible, l’état du manuscrit ne permettant pas de supposer qu’il ait passé par les mains des compositeurs d’imprimerie. D’Aubigné, en remettant son exemplaire à l’imprimeur, prend note, sur le manuscrit qui a servi à établir cet exemplaire définitif, de la date à laquelle il s’en est séparé. — Mais venons à des preuves plus directes.
Il est aisé tout d’abord de se convaincre que les imprimeurs de l’édition s. l. n. d. ont eu entre les mains, non pas un manuscrit, mais un exemplaire de l’édition princeps portant des additions et des corrections en marge, en surcharge ou sur des feuillets intercalés. Certaines fautes typographiques communes aux deux éditions en sont une
- ↑ Nous avons respecté scrupuleusement l’orthographe de cette édition ; mais nous avons cru pouvoir prendre toute liberté à l’égard de la ponctuation.