Page:Audiat - Bernard Palissy : étude sur sa vie et ses travaux.djvu/92

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imagine, les mêle et les broie. Il achète des pots de terre, met sur chacun d’eux dûment numéroté une matière différente qu’il note avec soin. Il a besoin d’un four et le construit à sa guise. Mais il n’a jamais vu cuire la terre, et ne sait quel degré de chaleur le four doit avoir ; une fois le feu trop fort brûle ses drogues ; une autre fois trop faible, il ne peut les fondre. C’est aux matières qu’il attribue ces insuccès ; il en cherche d’autres. Peut-être étaient-elles bonnes ! Plusieurs années se passent ainsi ; le pauvre artisan gémit, soupire, s’afflige, mais ne se décourage pas.

Un jour, il s’avise qu’il ne sait pas conduire le feu, et que des hommes du métier sauront mieux que lui diriger la cuisson de ses substances. C’est d’ailleurs une dépense de combustible de moins, et l’argent se fait rare à la maison. Il achète de nouveaux vases, en couvre trois ou quatre cents d’émail ; et prie les potiers de la Chapelle-des-Pots de les enfourner avec leurs vaisseaux. Les potiers de la Chapelle, un peu par complaisance, beaucoup par curiosité, acceptent très-volontiers. Mais la fournée cuite, ils assaillent de brocards leur outrecuidant camarade. Rien n’est bon.

Palissy, qui ne voit pas que le feu des potiers n’est pas assez violent, ou qu’ils n’ont pas enfourné ses épreuves en temps convenable, achète de nouveaux vases, prépare de nouvelles drogues, adresse aux potiers de la Chapelle de nouvelles pièces. On cuit une seconde fois, puis une troisième, puis une quatrième. Les frais sont grands ; la perte de temps est immense ; la confusion qui résulte de ses échecs répétés l’acca-