Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/191

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Enfin nous atteignîmes l’habitation du graveur, et je fus immédiatement conduit à son atelier où je trouvai le vieil artiste qui venait au-devant de moi, et m’accueillit par une cordiale poignée de main, en mettant de côté, pour un moment, son bonnet de coton un peu noirci par la fumée du lieu. C’était un homme grand, nerveux, à forte charpente, avec une grosse tête et des yeux si écartés, que je n’avais encore rien vu de pareil. — Véritable Anglais de la vieille roche, plein de vie, malgré ses soixante-quatorze ans, toujours actif et prompt au travail. — D’abord, il me proposa de me montrer l’ouvrage qu’il était en train d’exécuter, ce qu’il fit, sans quitter ses outils. C’était une petite vignette, taillée sur une plaque de buis, de trois pouces de surface sur deux, et qui représentait un chien ayant peur, la nuit, devant des objets qu’il croyait vivants, tandis qu’en réalité ce n’étaient que des racines, des branches d’arbres et des rochers auxquels on avait donné la forme d’êtres humains. Cette œuvre, comme toutes celles qui sortaient de ses mains, était exquise ; et plus d’une fois je me sentis tenté de lui demander quelque pièce de rebut ; mais je craignais de paraître indiscret, et d’ailleurs j’en fus empêché par l’invitation qu’il m’adressa de monter dans son appartement, où, me dit-il, j’allais bientôt voir se rassembler l’élite des artistes de Newcastle.

En entrant au salon, je fus présenté aux demoiselles Bewick, jeunes personnes aimables et gracieuses, qui n’avaient d’autre désir que de me rendre la soirée agréable. Parmi les visiteurs, je distinguai M. Goud,