Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/37

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poisson est pris. À la branche de saule qui pend de sa ceinture, notre amateur en a déjà accroché une centaine, lorsque, tout à coup, le ciel s’assombrit, et l’orage menace. Il sait très bien qu’en changeant seulement d’amorce et d’hameçon, il pourrait avoir sous peu une ou deux belles anguilles ; mais, en homme prudent, il aime mieux regagner le bord et emporter tranquillement son butin à la maison.

Voilà comment s’y prend le pêcheur à la ligne qui veut procéder méthodiquement et dans les règles ; et certes, il y a du plaisir à le voir, lorsqu’avec aisance et grâce il tend l’appât à l’objet de ses désirs, soit au milieu même des flots turbulents, soit à l’abri sous les basses branches du rivage, partout enfin où s’ébat une multitude de ces petits êtres jouissant en paix de leur trompeuse sécurité. Rarement, entre ses mains, son instrument s’embrouille et se mêle, tandis qu’avec une incomparable dextérité il les tire de l’eau l’un après l’autre.

Cependant il y a bon nombre de pêcheurs qui, par un procédé beaucoup plus simple, savent prendre tout autant de poissons, sans leur laisser même un instant pour se reconnaître. Voyez-moi ces joyeux petits garnements, dont l’un est planté debout sur la rive, pendant que les autres ont bravement enfourché les arbres qui sont tombés en travers de la rivière. Leurs gaules sont tout bonnement des baguettes de noisetier ou de noyer ; une corde leur sert de ligne, et leurs hameçons ne paraissent pas des plus fins. Le premier est porteur d’une calebasse remplie de vers qu’il garde en vie dans