Page:Augagneur, Erreurs et brutalités coloniales, Éditions Montaigne, 1927.djvu/15

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N’ayant en ses subordonnés qu’une confiance limitée, le sergent leur avait enlevé leurs munitions. Lui-même était porteur, outre une arme de chasse, d’un fusil Lebel.

Arrivé près de Marotsipanga, Vinay vit venir à lui le chef de ce pauvre village, dont l’importance et la puissance se limitaient à quelques cases. Le chef avertit Vinay que dans les environs rôdait Mahafiry, chef du faritany (canton) dont il dépendait. Mahafiry devait avoir de mauvais desseins puisqu’il avait interdit aux chefs des villages placés sous son autorité de recevoir le sergent Vinay ; d’autre part, projetant de tuer ce dernier, à sa sortie du village, il avait rassemblé des hommes à cet effet. Lui, chef sans influence, sans aides, se jugeait incapable de défendre le sergent. Et redoutant Mahafiry, il le suppliait de ne pas coucher à Marotsipanga, de pousser jusqu’à Antanamalaza, dont le chef plus puissant pourrait lui donner l’hospitalité et la sécurité. Vinay haussa les épaules et maintint sa décision de coucher à Marotsipanga. Ce que voyant, le chef, désireux de mettre sa responsabilité à couvert dans le cas où Mahafiry donnerait suite à ses menaces, avertit le sergent qu’il quittait le village et se réfugiait dans les bois avec sa famille. Il lui fit donner avant de partir des œufs et des poulets. Vinay se coucha dans la case du chef ; Itadava demeura chez son père dans une hutte, à quarante mètres environ de celle où dormait le sergent.

Dès la nuit venue, des indigènes s’étaient rassemblés en certain nombre et un Kabary[1] s’ouvrit où se discuta le sort réservé à Vinay. Les uns propo-

  1. Le Kabary est le nom malgache de toute réunion où s’échangent des opinions et des discours.