Page:Auguste de Gérando - La Transylvanie et ses habitants, 1845, Tome I.djvu/108

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bourg, la plus curieuse est la Tour du Pont, qui fait face à la Szamos. Elle est intacte. Massive, noire, et encore garnie des fortes chaînes qui barraient le passage, la Tour du Pont a conservé le caractère d’une époque qui est déjà loin de nous, et dont on retrouve peu de souvenirs dans les villes hongroises.

Un pont de bois d’un effet pittoresque sépare la capitale d’une colline hérissée de rochers. Là, parmi des troupeaux de chiens à demi-sauvages, qui montrent les dents au visiteur indiscret, réside une colonie de Gitanos redoutés. Hommes et animaux habitent dans le creux des rochers, sous des huttes qu’on prendrait pour des tentes. En traversant cette colline inhospitalière, on se croit dans la cour des miracles, et il semble qu’on reconnaisse ces hommes déguenillés, à l’air fripon, insouciant et rusé, dont on a lu si souvent la description. Quand il leur plaît d’avoir un métier, ils sont charrons, maréchaux ou maçons.

Ceux qui, entre les Gitanos, forment l’aristocratie, — car où n’y en a-t-il pas ? — ont soin de se loger à l’autre extrémité de la ville. Ils occupent deux cents maisons qui longent les remparts, et sont presque tous musiciens. Ils se réunissent par bandes, où ne sont admis que ceux qui ont fait preuve de talent, et vont se faire entendre de côté et d’autre. Au retour ils se partagent la recette, et il arrive quelquefois que le lot de chacun de ces artistes ambulants monte à une somme considé-