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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome II.djvu/214

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Dathan, de Coré et d’Abiron, comme l’a appelé le concile de Bagaïe, et duquel on a dit encore que si la terre rie s’est pas entr’ouverte pour l’engloutir, c’est qu’il était réservé à un plus grand supplice. « Car, ajoutent les Pères de votre concile, il aurait gagné à subir ainsi sa peine ; mais maintenant, demeuré comme mort au milieu des vivants, il voit chaque jour s’accroître le poids de la terrible dette qu’il lui faudra payer. » Or, dites-moi, je vous prie, s’ils n’ont pas touché ce mort impur lorsqu’ils se sont associés à lui pour condamner l’innocence de Primien ; car s’ils l’ont touché, ils se sont assurément souillés à ce contact. Pourquoi, ainsi rangés dans sa communion et séparés de la vôtre, ont-ils, comme s’ils eussent été innocents, obtenu pour leur retour un délai qui les faisait rentrer dans leurs dignités et dans l’intégrité de la foi ? Pourquoi, comme s’ils n’eussent pas assisté à l’ordination de Maximien, ont-ils mérité que vous disiez d’eux que le plant de l’arbrisseau sacrilège ne les a pas souillés ? N’étaient-ils pas dans le même parti, dans les liens du même schisme, séparés de vous, unis aux autres, établis ensemble en Afrique, très-connus d’eux, leurs amis et leurs complices ? S’ils n’étaient pas présents à l’ordination de Maximien, c’est pourtant à cause de lui qu’ils ont condamné Primien quoique absent ! Et l’on ose dire que la prétendue greffe empoisonnée de Cécilien a souillé, sur toute la terre, des peuples chrétiens très-nombreux, très-éloignés, très-inconnus, dont plusieurs n’ont pu savoir, je ne dis pas l’affaire, mais le nom même de Cécilien ? Ils ne participent point aux fautes d’autrui ceux qui, non-seulement ont connu la faute de Maximien, mais qui l’ont élevé contre Primien ; et ceux-là auront participé aux fautes d’autrui, qui ne savaient pas, dans les pays lointains, que Cécilien fût évêque, ou en avaient à peine entendu parler dans les pays plus rapprochés, ou qui, en Afrique même l’avaient su simplement, paisiblement et, à Carthage, n’avaient élevé cet évêque contre personne ! Ils ne s’entendaient pas avec le voleur, ceux qui communiquaient avec l’homme dont l’avocat Nummasius, plaidant pour votre évêque Restitut, a dit que, par un larcin secret et sacrilège, il avait usurpé la dignité épiscopale ! Ils n’avaient aucune part à l’adultère, ceux qui communiquaient avec le violateur adultère de la vérité ! Leur masse n’était pas corrompue par ce petit levain, quand ils l’applaudissaient, quand, retranchés de votre communion, ils demeuraient bien sciemment dans son parti, quand ils travaillaient à le séparer de plus en plus du vôtre et à le grandir à vos dépens ! Vous aussi qui, en les invitant à se réunir à vous, avez déclaré exempts de la souillure sacrilège les associés de Maximien, avez admis dans vos rangs avec tous leurs honneurs, Prétextat et Félicien, et les traitez comme amis, car, devenus vos amis aujourd’hui, Félicien siège parmi vos évêques ; vous n’êtes souillés en rien par le contact des fautes d’autrui, votre pureté se conserve au milieu de l’impureté, le levain d’aucune malignité ne vous atteint ! Et sur ces témoignages un crime étranger est reproché au monde chrétien ! un schisme funeste soutient qu’il a eu raison de rompre l’unité ! un rameau retranché traite de rameau impur celui qui demeure attaché au tronc qui l’a produit !

14. Que dirai-je de ces persécutions dont vous vous glorifiez ? Si ce n’est pas la cause, mais le supplice qui fait les martyrs, il était inutile qu’après avoir dit : « Heureux ceux qui souffrent persécution ! » le Seigneur ajoutât : « pour la justice[1]. » Mais à ce titre les maximianistes ne vous surpassent-ils pas infiniment en gloire, eux qui non-seulement ont souffert persécution avec vous, mais auparavant avaient été persécutés par vous ? J’ai rappelé plus haut les paroles de l’avocat plaidant contre Maximien en présence de votre collègue Restitut, qui, avant même l’expiration du temps marqué pour son propre retour, avait été ordonné à la place de Salvius de Membres, condamné sans délai avec les autres onze évêques : Titien aussi, après l’expiration de ce délai, adressa de sanglants reproches à Félicien et Prétextat au sujet de leur conspiration contre Primien ; et plus d’une fois on a invoqué contre eux le concile de Bagaïe devant les proconsuls et devant les juges des villes ; on s’est armé contre eux de jugements et d’ordres sévères, on a obtenu l’emploi de la force en cas de résistance et le concours municipal pour l’exécution des jugements. Pourquoi donc vous plaindre d’être persécutés, par nous, qui sommes loin de vous égaler en cela ? Comme la persécution n’est pas toujours la souffrance, vos clercs et vos circoncellions ont si bien composé avec nous, que votre partage serait la persécution,

  1. Matth, V, 10.