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LIVRE TROISIÈME.

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De quelque manière que se possède la sagesse humaine, je vois que je ne la connais p ;is en- core. Cependant n’ayant que trente-trois ans, je ne dois pis (lé ?es|iérer de l’acquérir un jour. J’avais résnln de. m’ap|ili(|Ui’r à 1 . ciiei’elu.’r, en méprisant yémraleMKMittuut ci ; que les hommes regardent ici-bas comme des biens. Cependant les raisons des académiciens m’effrayaient beaucoup dans celte entreprise : mais je me suis, je crois, assez armé contre elles dans cette discussion. Tout le monde sait (ju’il y a deux moyens de connaître : l’aiitorilé et la raison. Je suis résolu de ne m’écarter en rien de l’au- torité du Christ ; car je n’en trouve pas de plus puissante. Quanta ce qu’il faut examiner avec la pénétration de la raisim, car mon caractère me fait aidemment désirer de ne pas croire seulement la vérilé, mais aussi de la compren- dre, j’espère pouvoir trouver chez les platoni- ciens une doctrine qui ne sera pas opposée à nos saints mystères.

44.. S’apercevant ici que j’avais achevé mon discours, les jeunes gens, quoiqu’il fût nuit et qu’on eût même écrit ([uelque chose depuis qu’on nous aval ta[)[)orl( la lumière, attendaient vivement [lour savoir si Alype ne s’engagerait pas à repondre au moins un autre jour. Celui-ci alors : Je l’affirme, dil-il, jamais lieu ne m’a au- tant réussi que de sortir vaiiicude la discussion d’aujourd’hui. Et je ne crois pas que cette joie ne doive être que la mieiuie : je la partagerai donc avec vous, mes auligomstes, ou bieii nos juges. Car les académiciens eux-mêmes ont pi’ut-èlre souhaité d’élre vaincus de cette ma- nière par ceux qui devaient les suivre. En

  • Saint Augustin avait donc commencé cet ouvrage Contre les Aca-

démiciens dans sa irente-deiixième année, dit il lui-même fKét. liv. 1, ch- 2] pour rédiger le Traite de la Vie Bienheureuse, auquel avait donné cccasion l’aniuversaire de sa nai :>saoct ;, io novembre.

effet, que pouvions-nous trouver et que pou- vait on nous offrir de plus agréable par le charme du discours, de plus juste dans la gra- vité des pensées, de plus promptement donné par la bienveillance, et de plus rempli de science ? Je ne puis admirer assez dignement comment des questions aussi épineuses ont été traitées avec tant d’enjouement, avec quelle force on a triomphé du désespoir, avec quelle modération on a exprimé ses convictions, avec quelle clarté on a touché à des choses aussi obscures. Ainsi, mes amis, renoncez à votre attente, ne me provoquez plus à répondre, nourrissez plutôt avec moi une espérance plus ferme de nous instruire. Nous avons un guide pour nous conduire, sous la direction de Dieu même, dans le sanctuaire de la vérité.

43. Comme leur visage laissait voir un cer- tain mécompte puéril de ce qu’Alype ne pa- raissait pas vouloir me répondre : Eles-vous jaloux de ma gloire ? leur dis-je en souriant ? Sûr de la constance d’.lype, je ne le crains plus ; mais, pour vous donner sujet à vous- mêmes de me rendre grâces, je vais vous ar- mer contre celui qui a trompé si cruellement votre espoir. Lisez les Académiciens, et quand vous y aurez trouvé Cicéron vainqueur de ces bagatelles’ (i|u’y a-t-il de plus facile) ? obligez Alype de détendre mon discours contre les ar- guments invincibles de ce philosoidic. Voilà la récompense peu agréable que je l’accorde, Alype, en échange des louanges trop peu fon- dées que lu m’as décernées. — Cela les fit rire, et nous mîmes fin à celte longue discussion, so- lidement, je ne sais , mais (ilus rapidement et plus promplement que je ne l’avais espéré.

  • Rétr. liv. I, chap. I, n, 1.

Ir<utuction de M. Adrien de RIASCEY.