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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome III.djvu/454

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Silvae laborantes gelu et frigore.

Ce que tu sentiras pleinement, si tu reprends chaque fraction de pied.

23. On ne doit pas non plus, quand on pose deux pieds incomplets, mettre une fraction plus grande au commencement qu’à la fin. C’est une combinaison également condamnée par l’oreille, comme dans cet exemple :

Optimum tempus adest tandem, car le premier pied étant un crétique, le second un choriambe le troisième un spondée, il faut ajouter un silence de trois temps, deux pour le spondée final, un pour le crétique du commencement, afin de compléter les six temps. Au contraire si l’on dit :

Tandem tempus adest optimum, avec la même interposition d’un silence de trois temps, qui ne sent que la reprise ne soit fort agréable ? Ainsi donc il faut, ou que les fractions de pied du commencement aient le même nombre de temps que celle de la fin, comme dans cet exemple :

Silvae laborantes geluque[1]. ou que la plus petite soit placée au commencement, la plus considérable à la fin comme dans cet exemple :

Flumina constiterit acuto.

Rien de plus légitime. Car l’égalité empêche toute discordance : et s’il y a inégalité dans le nombre des temps, la progression qui va du plus petit au plus grand rétablit l’harmonie, comme le ferait une progression numérique.

21. Autre conséquence. Quand on pose ces fractions de pieds dont il est question, et qu’on met un silence avant la fin et à la fin, il faut mettre avant la fin un silence égal à celui qu’exige la fraction finale, et à la fin, un silence égal à celui qu’exige la fraction du commencement ; car le milieu est en rapport avec la fin, et c’est de la fin qu’il faut revenir au commencement. S’il faut ajouter un silence d’égale durée à ces deux endroits, nul doute que le silence avant la fin ne doive avoir une durée égale à celui de la fin. De plus un silence ne doit jamais se placer qu’après un mot complet. S’agit-il, non de paroles chantées, mais de musique à l’aide d’instruments à cordes ou à vent, et même de solmisation ? peu importe après quelles notes ou quel posé, on place les silences, pourvu qu’on les entremêle régulièrement d’après les principes ci-dessus établis. Ainsi donc un mètre peut commencer par deux pieds incomplets, pourvu que les temps réunis de ces fractions ne soient pas moindres que ceux d’un pied et demi. Car nous avons observé plus haut que deux fractions de pied vont très-bien lorsque le complément qu’elles exigent ne dépasse pas en durée un demi-pied exemple : montes acuti : nous pouvons en effet ajouter à la fin un silence de trois temps, ou l’équivalent d’un pied et demi, ou un silence d’un temps après le spondée et deux à la fin. Il n’est pas d’autre moyen de scander convenablement ce mètre.

CHAPITRE XV.

SUITE DE L’INTERPOSITION DE SILENCES DANS LE MÈTRE.

25. Etablissons encore cette règle : quand nous mettons un silence avant la fin, le membre de phrase ne doit pas être terminé, à cet endroit, par une brève, de peur que l’oreille, d’après-la règle si souvent formulée, ne rende cette brève longue, par l’effet du silence. Dans ce mètre, montibus acutis, on ne peut donc placer un silence d’un temps après le dactyle, comme on l’avait fait régulièrement tout à l’heure après le spondée : car, au lieu d’un dactyle, on entendrait un crétique, et le mètre, loin de se composer de deux fractions de pieds, ce que nous cherchons à prouver par cet exemple, semblerait se composer, d’un ditrochée complet et d’un spondée pour finale, par l’effet d’un silence de deux temps ajouté à la fin.

26. Un point également digne de remarque, c’est que, quand on commence par un pied incomplet, le silence complémentaire se place soit au commencement même, comme dans ce mètre

Jam salis terris nivis atque dirae. soit à la fin, comme dans celui-ci :

Segetes meus labor.

  1. Que longue ici comme finale et suivie d’un silence.