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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome III.djvu/453

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seulement à la fin du mètre, mais avant la fin, lorsque le besoin s’en fait sentir ; et il se fait sentir dans deux cas, lorsque la finale brève ne permet pas de placer à la fin le silence nécessaire pour compléter le nombre des temps, comme dans le dernier exemple, ou lorsque deux pieds incomplets se trouvent placés l’un au commencement, l’autre à la fin, comme dans cet exemple :

Gentiles nostros inter oberrat equos[1].

Tu auras remarqué, je pense, qu’après les cinq premières longues, j’ai observé un silence de deux temps et qu’il faut en observer un d’égale durée à la fin, en revenant au commencement. Car si, en battant la mesure de ce mètre, tu prends six temps pour le levé et le posé, tu trouveras d’abord un spondée, puis un molosse, en troisième lieu un choriambe et enfin un anapeste. Or le spondée et l’anapeste exigent un silence de deux temps pour former des pieds de 6 temps complets, par conséquent, il faut un silence de deux temps après le molosse, avant la fin, et un silence également de deux temps, après l’anapeste, à la fin du mètre. Veut-on avoir des pieds de quatre temps ? On mettra une longue au commencement, on comptera ensuite deux spondées, puis deux dactyles, et pour terminer on mettra une longue.

On placera donc un silence de deux temps après le double spondée, avant la fin, et un silence d’égale durée, à la fin, pour compléter les fractions de pieds placées, l’une au commencement, l’autre à la fin. §20. Toutefois, dans certains cas, le temps qu’exigent deux pieds incomplets, dont les fractions sont placées l’une au commencement, l’autre à la fin, n’est rempli que parle silence final ; mais ce temps ne doit pas dépasser la durée d’un demi-pied, par exemple :

Silvae laborantes geluque[2]
Flumina constiterint acuto.

Le premier de ces mètres commence par un palimbacchius, continue par un molosse et se termine par un bacchius ; il faut donc un silence de deux temps : en ajoutant l’un au bacchius, l’autre au palimbacchius, les six temps seront partout complets. Quant au second, il commence par un dactyle, continue par un choriambe et se clôt par un bacchius. Il faudra donc un silence de trois temps, ajoutons un silence d’un temps au bacchius, de deux temps au dactyle, et tous les pieds auront six temps.

21. C’est par le dernier pied, et non par le premier, qu’on commence à ajouter le silence complémentaire ; les exigences de l’oreille interdisent toute autre marche et il n’y a là rien qui doive surprendre ; car, en faisant la reprise, on ajoute au commencement la fraction de pied qui est à la fin. Ainsi dans le mètre déjà cité :

Flumina constiterint acuto.

Puisqu’il faut un silence de trois temps pour avoir partout des pieds de six temps, suppose que tu veuilles compléter ce temps par un son au lieu d’un silence, et que tu mettes un iambe, un trochée, un tribraque, qui sont tous des pieds de trois temps. Eh bien ! l’oreille ne permet pas ici un faux usage du trochée, dont la première syllabe est une longue, et la seconde, une brève. Car on doit d’abord entendre le complément nécessaire au bacchius final, c’est-à-dire une brève, et non une longue ; qu’exige le dactyle. C’est ce qu’on peut vérifier sur ces exemples :

Flumina constiterint acuto gelu.

Flumina constiterint acute gelida.

Flumina constiterint in alta nocte.

Les deux premiers offrent une reprise fort agréable, le dernier, détestable ; c’est hors de doute.

22. De même quand les fractions de pied exigent chacune leurs temps, si tu veux représenter ces temps par des mots, l’oreille ne permet pas qu’ils soient réunis en une seule syllabe longue : et cette répartition est singulièrement juste. Car il faut bien diviser un supplément qui doit être réparti entre plusieurs. Ainsi dans ce mètre :

Silvae laborantes geluque,

Si, au lieu du silence complémentaire, tu ajoutes une syllabe longue, en mettant par exemple :

Silvae laborantes gelu duro. L’oreille n’approuve pas ce complément comme elle ferait, si nous disions :

  1. Il galope au milieu des chevaux de notre nation.
  2. La trompette fait retentir avec l’airain recourbé un son terrible.