Aller au contenu

Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome III.djvu/465

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ne pas s’apercevoir en effet qu’il faut ici commencer par un et mi-pied, comme dans levers héroïque ? En suivant cette marche, le vers se scande par trochées et non par iambes, et il se termine régulièrement par un demi-pied.

12. Le M. À la bonne heure. Mais comment vas-tu scander levers nommé asclépiade ; par exemple :

Maecenas atavis edite regibus[1].

Le vers est coupé à la sixième syllabe ; or ce n’est pas là une exception, c’est un usage pour ainsi dire consacré dans les vers de cette espèce. Le premier hémistiche est donc : Maecenas atavis ; le second : edite regibus. La raison de cette coupure peut sembler douteuse. Scande en effet ce vers par pieds de quatre temps ; tu trouveras cinq demi-pieds dans le premier membre, quatre dans le second. Or la règle défend de former le second membre d’un nombre pair de demi-pieds, si l’on veut que le vers ne soit pas terminé par un pied complet. Il faut donc voir dans les vers de cette espèce des pieds de six temps, ce qui nous donnera deux hémistiches composés de demi-pieds trois à trois. Pour que le premier membre finisse par un pied complet, il faut commencer par deux longues ; vient ensuite un choriambe qui partage le vers de telle sorte que le second membre commence également par un choriambe et que le vers se termine par un demi-pied de deux brèves : ces deux temps ajoutés au spondée placé en tête font un pied complet de six temps.


Aurais-tu quelque observation à m’adresser ? — L’E. Mais vraiment non. — Le M. Tu ne vois donc pas d’inconvénient à former chaque membre d’un nombre égal de demi-pieds ? — L’E. Eh ! pourquoi ? 2 n’y a point à craindre ici de conversion, parce que si on met le second membre à la place du premier et réciproquement, la marche des pieds ne sera plus du tout la même. Il n’y a donc aucune raison pour ne pas composer les deux membres, dans cette espèce de vers, d’un égal nombre de demi-pieds ; cette égalité exclut en même temps la conversion des deux membres, et la règle qui exige une terminaison saillante est respectée, le vers finissant, comme il doit toujours finir, par une fraction de pied.


CHAPITRE VII.

COMMENT PEUT-ON RAMENER À L’ÉGALITÉ LE NOMBRE INÉGAL DES DEMI-PIEDS DANS CHAQUE MEMBRE ? DU RAPPORT D’ÉGALITÉ ENTRE LES MEMBRES DE 4 ET DE 3 DEMI-PIEDS, DE 5 ET DE 3 DEMI-PIEDS.

13. Le M. La question maintenant n’offre plus de difficulté. La raison donc nous ayant fait découvrir qu’il y a deux sortes de vers, les uns où le nombre des demi-pieds est le même dans les deux membres, les autres, où il est inégal, examinons avec attention, si tu le veux bien, par quel secret cette inégalité se ramène à un rapport d’égalité ; cela tient à un calcul un peu difficile, mais très-exact. Réponds, je te prie, à cette question : quand je dis 2 et 3, de combien de nombres ai-je parlé ? — L’E. De deux nombres. — Le M. Donc 2 est un nombre aussi bien que 3, et ainsi de suite ? — L’E. Oui. — Le M. Ne peut-on inférer de là que le nombre un a un rapport sensible avec tous les autres nombres ? Car, s’il est absurde de dire que 1 est 2, il ne l’est pas de dire qu’à certains égards 2 est 1 ; de même il n’y a pas d’erreur à prétendre que 3, que 4 sont 1. — L’E. J’y souscris. — Le M. Autre question : 2 multiplié par 3, combien font-ils ? — L’E. 6. — Le M. 6 et 3 font-ils autant ? — L’E. Non vraiment. — Le M. Multiplie de même 3 par 4, je te prie, et dis-moi quel est le produit ? — L’E. 12. — Le M. Tu vois encore que 12 est plus grand que 4. — L’E. Et de beaucoup. — Le M. Sans aller plus loin, posons cette règle : À partir de 2, quelque nombre que l’on prenne, le plus petit multiplié par le plus grand, doit nécessairement surpasser le plus grand. — L’E. Peut-on en douter ? Car, y a-t-il, en fait de pluralité, un nombre inférieur à 2 ? Cependant, si je multiplie ce nombre par mille, il devient le double de mille : quelle différence 1. — Le M. Fort bien. Mais prends 1 et un nombre quelconque pour facteur ; multiplie comme tu viens de le faire, le plus petit par le plus grand ; est-ce que le plus petit surpassera encore le plus grand ? — L’E. Non, le plus petit deviendra égal au plus grand. Car une fois 2 est 2, une fois 10 est 10, une fois 1000 est 1000, et quelque soit le multiplicateur 1 lui devient nécessairement égal. — Le M. Ainsi donc le nombre 1 a, par une sorte de

  1. Mécène, rejeton d’une race royale. (Horace, liv. 1, od. 1.)