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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome IX.djvu/449

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Quand un homme doit venir pour juger, comme il ne voit point le fond des consciences, que les hommes tremblent, fussent-ils innocents, si c’est de lui qu’ils attendent la louange, ou qu’ils craignent le supplice : mais quand viendra celui qui ne peut errer, que les montagnes se réjouissent, et soient en sûreté : elles recevront de lui la lumière, au lieu de subir la condamnation. Qu’elles se réjouissent, parce que le Seigneur viendra juger la terre dans l’équité. Mais si les montagnes justes se réjouissent, que les injustes soient dans la crainte. Ce juge cependant n’est point encore venu, à quoi bon trembler ? Qu’elles se corrigent et se réjouissent. Elle dépend de toi, cette manière dont tu attendras le Christ. S’il diffère de venir, c’est afin (le ne point te damner. Voilà qu’il n’est point venu encore, il est au ciel, et toi sur la terre ; s’il diffère son avènement, ne diffère pas ton choix. Son avènement sera dur pour les cœurs endurcis, et doux pour les cœurs doux. Vois ce que tu es maintenant : si tu es endurci, tu peux t’adoucir ; si tu es doux, réjouis-toi de son avènement : car tu es chrétien. Oui, me dis-tu. Je crois donc que tu pries, et que tu dis : « Que votre règne arrive[1] ». Tu désires qu’il vienne, et tu crains qu’il vienne. Corrige-toi, afin de ne pas prier contre toi.


DISCOURS SUR LE PSAUME 98

SERMON AU PEUPLE.

LE RÈGNE DE JÉSUS-CHRIST.

Le Christ annoncé dès le commencement par les Prophètes a régné quand on a commencé à le prêcher après sa résurrection. Le monde alors prit parti pour l’idole, il tua dans les martyrs cette chair qui doit ressusciter, mais non l’âme qui est couronnée, tandis que l’idole a disparu. Le Seigneur s’est donc fait homme et il a régné, il s’assied sur les chérubins ou sur la plénitude de ta science, et en toi, si lu as la science de la loi par la charité. Or, ces peuples frémissants ont été vaincus par la prière de l’Église qui les a absorbés ; prions pour ceux qui sont demeurés dans l’aveuglement, afin qu’ils se tournent enfin vers Dieu, qui est mort pour eux, qui leur prêche dans sa miséricorde, qui oublie nos fautes, mais qui enfin nous jugera. C’est lui qui forme eu nous la justice, car si nous pouvons par nous-mêmes devenir malades, il faut le secours du médecin pour nous guérir. Il produit donc en nous le jugement qui nous rat discerner ce qui est bien, et la justice qui l’accomplit. Adorons l’escabeau de ses pieds ou cette chair en laquelle il s’est montré, qui fit éloigner les disciples quand il leur proposa de la manger, lui dont Moïse, Aaron et Samuel étaient les serviteurs, et à qui il parlait d’une manière figurée, corrigeant leurs affections, ou ce qui était imparfait. Car nous ne voyons en eux aucun châtiment extérieur, mais leur peine était de vivre avec les imparfaits. À mesure que nous avançons dans la piété, nous voyons l’ivraie autour de nous, mais ne l’arrachons pas. De même saint Paul souffre davantage à mesure qu’il avance dans la perfection. Adorons le Seigneur qui nous éprouve, adorons-le sur la montagne sainte, et dans cette pierre qui grandit et remplit toute la terre. Que nos paroles soient pour vous la pluie du Seigneur.


1. Votre charité, mes frères, ne peut ignorer, car vous êtes enfants de l’Église, instruits à l’école de Jésus-Christ, et dans les écrits de nos pères de l’Ancien Testament, qui ont consigné les paroles de Dieu, les merveilles de Dieu, que leur but était de nous instruire, nous qui devions vivre en ces temps et croire en Jésus-Christ. Il est venu à nous d’abord dans son humilité au temps précis, il viendra ensuite dans sa splendeur. Il est venu une première fois, pour comparaître devant un juge ; il viendra une seconde fois, pour s’asseoir sur son tribunal, afin que tous les membres du genre humain comparaissent devant lui chacun selon ses mérites. Il s’est fait précéder de plusieurs hérauts, qui l’ont annoncé comme un grand juge, et aussi comme un homme qui viendra dans son humilité. Beaucoup également l’ont annoncé comme devant naître d’une vierge, sucer la mamelle comme un nouveau-né, puis devenir enfant, lui le Verbe de Dieu par qui tout a été fait ; plusieurs hérauts t’ont précédé pour prédire ces merveilles et les temps où nous sommes. Toutefois, en les prédisant, ils cachaient leurs pensées sous des figures, jusqu’à ce que le voile

  1. Mt. 6,10