Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome VII.djvu/116

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il pas : « Que par la foi le Christ habite en vos cœurs[1] ? »

6. Mais c’était Zachée, c’était un chef de publicains, c’était un grand pécheur ; et comme si elle n’eût rien eu à se reprocher, cette foule qui empêchait de voir Jésus, s’étonna et blâma le Sauveur d’être entré chez ce pécheur. C’était blâmer le Médecin d’être entré chez le malade. Aussi, pour répondre à ces pécheurs qui croyaient rire d’un pécheur, à ces malades qui se moquaient d’un homme guéri, le Seigneur s’écria : « Aujourd’hui cette maison est sauvée[2] ». Pourquoi y suis-je entré ? Le voilà : « Elle est sauvée ». Elle ne le serait pas, si le Sauveur n’y était entré. Pourquoi, malade, t’étonner encore ? Toi aussi, appelle Jésus, sans te croire en santé. Il y a espoir pour le malade que visite le Médecin ; il n’y en a point pour celui qui se jette comme un furieux contre lui. Mais quelle n’est pas la fureur de celui qui va jusqu’à le tuer ? Quelle bonté aussi, quelle puissance dans le Médecin qui fait avec son sang un remède pour le furieux qui l’a versé ? Car ce n’est pas en vain que du haut de la croix où il était monté en venant chercher et sauver ce qui était perdu, il s’écriait : « Mon Père, pardonnez-leur, car ils ne savent ce qu’ils font ». Ils sont en délire, mais je suis leur Médecin ; qu’ils frappent, je supporte les coups ; je les guérirai, quand ils m’auront mis à mort. – Soyons donc du nombre de ceux qu’il guérit. « Une vérité humaine et digne de toute confiance, c’est que Jésus-Christ est venu au monde : pour sauver les pécheurs », grands et petits ; « pour sauver les pécheurs » ; car « le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu ».

7. Dire que dans l’enfance Jésus ne trouve rien à sauver, c’est nier que le Christ soit Jésus pour tous les enfants fidèles. Oui, dire que dans l’enfance il n’y a rien à sauver pour' Jésus, c’est dire absolument que le Christ Notre-Seigneur n’est pas Jésus pour les enfants fidèles, en d’autres termes, pour les enfants qui ont reçu son baptême. Qu’est-ce en effet que signifie Jésus ? Jésus signifie Sauveur. Donc le Christ n’est pas Jésus pour ceux qu’il ne sauve pas, parce qu’en eux il n’y a pour lui rien à sauver. Maintenant, si vous pouvez entendre dire que pour quelques-uns de ceux qui ont reçu le baptême le Christ n’est pas Jésus, je ne sais si votre foi est bien en règle. Ce sont des enfants, il est vrai, mais ils deviennent ses membres ; ce sont des enfants, mais ils reçoivent ses sacrements ; ce sont des enfants, mais ils partagent sa table pour avoir en eux la vie. Pourquoi me dire : Cet enfant a bonne santé, il est sans vice ? S’il est sans vice, pourquoi cours-tu le porter au Médecin ? Ne crains-tu pas que ce Médecin ne te réponde : Loin d’ici cet enfant, puisque tu le crois en bonne santé ? Le Fils de l’homme n’est venu chercher et sauver que ce qui était perdu. Pourquoi me l’apporter, s’il n’est pas perdu ?

8. « Une vérité humaine et digne de toute confiance, c’est que Jésus-Christ est venu au monde ». Pourquoi y est-il venu ? « Pour sauver les pécheurs ». Il n’est venu que pour ce motif ; ce ne sont pas nos mérites, mais nos péchés, qui l’ont attiré du ciel sur la terre. Il est donc venu réellement « pour sauver les pécheurs. – Tu l’appelleras Jésus », est-il dit. – Pourquoi « Jésus ? Parce que c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés[3]. – Tu l’appelleras Jésus ». Pourquoi « Jésus ? » Quel est le motif de cette dénomination ? Le voici : « Parce que c’est lui qui sauvera son peuple ». De quoi ? « De ses péchés. Son peuple, de ses péchés ». Or, de ce peuple que Jésus « sauvera de ses péchés », est-ce que ne font point partie les enfants ? Oui, oui, mes frères, ils en font partie. Croyez-le, soyez-en bien persuadés, c’est avec cette foi que vous devez présenter vos enfants à la grâce du Christ ; sans elle en effet, vous les mettriez à mort en répondant pour eux. Pourquoi, sans cette croyance, s’empresser de porter son enfant au baptême ? Ce n’est pas être sérieux, c’est dire : Il a bonne santé, il n’a ni vice ni défaut ; cependant je le présenterai au Médecin. Pourquoi ? Parce que c’est la coutume. Ne crains-tu pas ; que le Médecin ne te réponde : Sors d’ici avec lui ; « ce ne sont pas ceux qui se portent bien, mais ceux qui sont malades ; qui ont besoin du Médecin[4] ? »

9. Je voudrais avoir recommandé à votre charité la cause de ces petits, incapables de parler pour eux-mêmes. Tous, et ceux mêmes qui n’ont pas perdu leurs parents, doivent être considérés comme des orphelins ; et ces jeunes prédestinés, qui attendent

  1. Eph. 3, 17
  2. Luc. 19, 1-10
  3. Mat. 1, 21
  4. Id. 9, 12