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QUATRIÈME SÉRIE.

DISCOURS SUR LES PSAUMES.




DISCOURS SUR LE PSAUME I.



L’homme céleste et l’homme terrestre. — Le premier est Jésus-Christ, le second est Adam pécheur. — Jésus-Christ ayant évité les pièges dans lesquels Adam trouva la mort, aura dans l’Église une postérité que formeront les saints. — Adam pécheur sera le père des impies.

1. « Bienheureux l’homme qui ne s’est point laissé aller au conseil des impies[1] » Cette bénédiction doit s’appliquer à Jésus-Christ Notre-Seigneur, qui est l’homme divin ( Rétract. XIX). « Bienheureux l’homme qui ne s’est point laissé aller au conseil des impies », comme l’Adam terrestre, qui écouta sa femme séduite par le serpent, et méprisa le précepte du Seigneur[2]. « Et qui ne s’est pas arrêté dans la voie des pécheurs ». À la vérité, Jésus-Christ est venu dans la voie du péché, puisqu’il est né comme les pécheurs, mais il ne s’y est pas arrêté, car il ne s’est pas épris des attraits du monde. « Et ne s’est point assis dans la chaire de pestilence ». Car il ne voulut point avoir sur la terre un trône fastueux, et voilà ce qui est justement appelé trône pestilentiel ; de même en effet que l’amour de la domination, que l’appétit de la vaine gloire se glisse dans presque toute âme humaine ; de même la peste est cette maladie qui se répand au loin, attaquant tous les hommes ou à peu près. Une chaire de pestilence se dirait mieux néanmoins d’une doctrine perverse, dont l’enseignement est envahissant comme la gangrène[3]. Voyons ensuite la gradation de ces termes : « S’en aller, s’arrêter, s’asseoir ». L’homme s’en est allé, quand il s’est retiré de Dieu ; il s’est arrêté, quand il a pris plaisir au péché ; il s’est assis, quand affermi dans son orgueil, il n’a pu retourner sans avoir pour libérateur celui qui ne s’est point laissé aller au conseil de l’impie, ne s’est point arrêté dans la voie des pécheurs, ni assis dans la chaire de pestilence.

2. « Mais qui s’est complu dans la loi du Seigneur, et qui méditera cette loi jour et nuit[4] ». La loi n’est pas établie pour le juste[5], a dit l’Apôtre. Mais être dans la loi n’est pas être sous la loi. Être dans la loi, c’est l’accomplir ; être sous la loi, c’est en recevoir l’impulsion. Dans le premier cas, c’est la liberté, dans le second, c’est l’esclavage. Autre encore est la loi écrite qui s’impose à l’esclave, et autre la loi que lit, dans son cœur, celui qui n’a pas besoin de loi écrite. « Méditer la loi jour et nuit », signifie la méditer continuellement, ou bien « le jour » s’entendra de la joie, et « la nuit », de la tribulation ; car il est dit : « Abraham vit mon jour et il en tressaillit de joie[6] » ; et à propos de la tribulation, le Psalmiste a dit : « Bien avant dans la nuit, mon cœur a été dans l’angoisse[7].

3. « Il sera comme l’arbre planté près du courant des eaux », c’est-à-dire près de la Sagesse elle-même, qui a daigné s’unir à l’homme pour notre salut, afin que l’homme fût un arbre planté près du courant des eaux ; car c’est ainsi qu’on peut entendre cette autre parole du Psalmiste : « Le fleuve de Dieu est

  1. Ps. 1,1
  2. Gen. 3,6
  3. 2 Tim. 2,17
  4. Ps. 1,2
  5. 1 Tim. 1,9
  6. Jn. 8,56
  7. Ps. 15,7