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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/690

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les témoins, avait déjà, avant de naître, député les Prophètes dans le même but. Les Prophètes et les Apôtres sont donc venus, envoyés qu’ils étaient par la vérité, et ils ont entendu à la même école ce qu’ils devaient nous enseigner à leur tour. Dans leurs paroles, rien de faux, rien de hasardé : tout y est manifestement vrai, tout y est véritablement manifeste. Voilà, mes très-chers frères, la doctrine des Prophètes et des Apôtres. Lorsqu’en parlant du Fils de Dieu, ils le désignent comme Créateur et créature, comme faisant et comme fait, comme tenant du temps et de l’éternité, il n’y a rien de discordant en leur manière de s’exprimer ; la fausseté ne vicie pas non plus leur enseignement, mais leur profession de foi sur l’une et l’autre naissance est l’expression vraie de la vraie foi, de la foi qui sauve. Il est, en effet, évident, que du Seigneur, Fils unique de Dieu, on peut toujours affirmer une double naissance, puisqu’en lui se trouvent réellement unies la substance divine et la substance humaine. Voilà pourquoi l’Église catholique reconnaît, sans hésiter, en un seul et même Fils de Dieu son créateur et son rédempteur ; son créateur, parce que, comme Dieu, il lui a donné l’existence ; son rédempteur, parce que, comme homme, il a été fait à cause d’elle. Cette chaste épouse reconnaît en lui, et sans l’ombre d’un doute, son époux ; car elle lui est unie dans la plénitude et la vérité des deux natures. Elle confesse qu’il est son chef et que ce chef non-seulement est du Père, demeure dans le Père, est l’Éternel et immuable Seigneur, mais est devenu, tout étant Dieu, un homme parfait, né, dans le temps, de la Vierge Marie. Elle sait qu’il a, avec le Père, une seule nature divine, et, comme sa mère, la nature humaine, c’est-à-dire un corps et une âme. Elle avoue qu’un seul et même Christ a commencé à exister, et n’a jamais eu de commencement ; car, l’Église catholique en fait profession, le Fils unique de Dieu est, tout à la fois, Dieu éternel de Dieu éternel, et homme temporel d’homme temporel. Aussi prêche-t-elle un seul et même Fils de Dieu, égal et inférieur au Père ; car elle sait qu’il n’y a qu’un seul médiateur entre Dieu et les hommes[1], Jésus-Christ homme. En effet, Dieu le Fils nous a emprunté notre nature pour la sauver ; et Dieu, après nous l’avoir empruntée tout entière, l’a sauvée de même par l’effet d’une bonté toute gratuite. Ainsi est-il arrivé que Dieu le Père a accordé le salut à l’homme par les mérites de Dieu le Fils avec qui il partage la divinité : de là il résulte encore que l’homme a obtenu le salut de Dieu le Père, par l’entremise de Dieu le Fils, entré en participation de la nature humaine : d’où il suit, enfin, que, pour les fidèles, la vraie source du salut se trouve en un seul et même Fils de Dieu. Telle est donc la véritable règle de la foi catholique, voilà en quoi consiste la divine et saine doctrine : croire qu’il y a véritablement deux natures dans la personne du Fils de Dieu, et confesser, avec non moins d’assurance, la vérité des deux naissances d’un seul et même Fils de Dieu.

7. Mes frères, que ce point de foi soit donc bien certain pour nous ; que la croyance en soit bien affermie dans nos cœurs, appuyée sur la vérité de la foi et profondément enracinée dans la charité : Dieu, le Fils unique, par qui toutes choses ont été faites, est vraiment né une fois avant tous les temps, et une fois dans le temps ; une fois, sans avoir commencé, et une fois à une époque déterminée ; une fois de Dieu le Père, et une fois de la Vierge Marie ; de Dieu le Père sans avoir de mère ; de la Vierge Marie, non pas sans avoir de Père, mais sans avoir un homme pour père. En effet, Dieu le Fils a Dieu pour père, non-seulement entant qu’il est né de lui sans avoir commencé et qu’il est Dieu de Dieu le Père ; mais aussi en tant qu’il est né de la Vierge, dans le temps, et qu’étant Dieu il a été fait homme. Pour sa première naissance, le Verbe s’est échappé du cœur[2] de Dieu le Père ; dans la seconde le Verbe s’est fait chair dans le sein de la Vierge Mère, et Marie l’a enfanté. À sa première naissance, il a été engendré par le Père, et il est sorti de son sein, et c’était le Dieu Très-Haut, à sa seconde, le même Dieu, devenu un humble époux, est sorti d’un lit virginal ; par la première, il nous a faits, et par la seconde, il nous a donné une nouvelle vie ; par l’une, il nous a créés ; et par l’autre, il nous a rachetés ; par celle-là, nous sommes devenus hommes ; par celle-ci, nous avons été adoptés comme enfants de Dieu. Parla première, il est notre Créateur et nous sommes son ouvrage ; par la seconde, il est notre Rédempteur et nous sommes son héritage. Par l’une le Fils

  1. 1Ti. 2, 5.
  2. Psa. 44, 2.