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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/706

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verge d’Aaron fut seule à produire des feuilles, des fleurs et des amandes. Elle fut le symbole de la bienheureuse Vierge. Comme, en effet, Marie avait été élevée sous l’empire de l’ancienne loi, et qu’elle avait pris part, avec ses parents, aux cérémonies légales, elle semblait avoir été placée avec les autres dans le tabernacle ; mais pendant que les Juifs demeuraient stériles sous le rapport de la foi et des bonnes œuvres notre tige d’Aaron, fécondée par l’Esprit-Saint, produisit les feuilles des bonnes œuvres et donna une fleur odoriférante, puis un fruit d’une saveur sans égale, Notre-Seigneur Jésus-Christ. Sans avoir été humectée par la rosée ou trempée par la pluie, sans rien perdre de sa substance, la verge d’Aaron a produit une amande : la royale Vierge, baignée de la rosée céleste, trempée de la pluie divine, et conservant intacte son innocence, a mis au monde le Fils de Dieu. La verge d’Aaron n’avait pas de racine, et elle a fleuri : Marie n’a pas connu d’homme, et elle a conçu en fleurissant. La verge d’Aaron n’a rien perdu de sa verdeur la Vierge n’a subi, en son intégrité, aucun dommage par son enfantement sacré.

3. Salomon avait encore en vue la vierge Marie, quand il a dit : « Quand l’amandier fleurira, le câprier sera détruit, la sauterelle deviendra pesante[1] ». Vous le savez, mes bien-aimés frères, de tous les arbres, l’amandier est le premier à fleurir, lorsque viennent les chaleurs du printemps, et il produit une fleur d’odeur singulièrement agréable : ainsi la Vierge Mère, sous la chaude influence de l’Esprit-Saint, a conçu de bonne heure ; puis elle a fleuri, et sa fleur a répandu dans le monde le plus suave parfum. Pour le câprier, d’une odeur peu agréable, amer au goût, il figurait le peuple juif, qui, tout imprégné de l’amertume et de la sévérité de la loi, n’a jamais montré aucune douceur d’esprit, ni obéi que dans l’amertume de la lettre au moment où l’amandier a fleuri, la lettre a disparu, parce que, la Vierge ayant enfanté le Fils de Dieu, les rites de la loi ont été abolis et ont cessé d’être, et le peuple juif, en punition de sa perfidie, a été détruit et dispersé dans tout l’univers. Y a-t-il le moindre avantage à ce que la sauterelle se reproduise ? Certainement non ; peut-on en faire usage ? Non encore. Vous ne pouvez la saisir, elle saute de 101 et de là ; elle fait entendre un cri strident : de quel autre peuple est-elle l’image, que du peuple des Gentils ? Ne donnant aucun fruit de justice, se laissant emporter à tout vent de doctrine[2], n’ayant de confiance que dans le grand nombre et la sonorité des paroles, étrangers à la personne divine du Verbe, pareils, enfin, à des sauterelles, les Gentils semblaient n’avoir ni sang ni fécondité. Mais sitôt qu’ils furent convertis et respirèrent le parfum répandu par les branches naissantes du jeune amandier, sitôt qu’ils eurent goûté du miel de ses fleurs, la pâleur et la maigreur, conséquences de leurs vices, disparurent pour faire place à l’embonpoint que donne la grâce céleste. C’est donc avec raison que le Prophète a dit : « Quand fleurira l’amandier, le câprier sera détruit et la sauterelle deviendra pesante » : En effet, lorsque notre virginal amandier a eu produit sa fleur délicieuse, Jésus-Christ, la nation juive a disparu en punition de sa perfidie, et le peuple des Gentils s’est converti, et l’abondance de l’Esprit-Saint, avec la graisse des bénédictions d’en haut, est venue lui donner une santé spirituelle florissante. C’est donc avec justesse qu’on l’a désignée la bienheureuse Vierge, sous les noms d’étoile, de verge et d’amandier ; car elle a brillé comme une étoile, projetant autour d’elle les rayons de ses vertus : pareille à une verge, elle a conservé, avec fermeté et d’une manière inflexible, la droiture de la justice ; puis, comme un amandier, elle a produit les belles et odorantes fleurs de toutes les perfections.

4. Toutefois, cette étoile virginale se trouvait enfermée dans les étroites limites d’une étable, avec le Soleil de justice qu’elle avait mis au monde ; aussi, et afin de la faire connaître, un astre d’un éclat nouveau apparaît-il en Orient ; par l’éclat inouï de sa lumière, il prévient les Gentils de l’apparition de l’étoile sortie de Jacob, et, marchant en avant des Mages pour leur indiquer leur chemin, il les amène jusqu’à Bethléem. C’est ainsi que le ciel fait connaître le ciel, qu’une étoile indique une étoile, que la lumière rend témoignage de la lumière, qu’un astre découvre un astre. Les Juifs sont là, tout près, et ils ne veulent reconnaître l’enfant Jésus ni d’après les oracles des Prophètes, ni sur l’attestation des Mages, et, sur un signe venu du ciel par le moyen d’une

  1. Ecc. 12, 5
  2. Eph. 4, 14