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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/745

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qu’il échappera, sans meurtrissure, aux épreuves dont il se verra assailli, comme un voyageur aux aspérités de sa route, et foulera aux pieds, sans crainte de se voir blessé par eux, les animaux venimeux qui cherchent à nous mordre au talon. Il tiendra aussi en sa main un bâton, c’est-à-dire, qu’avec une sollicitude toute pastorale, il s’efforcera de veiller sur lui-même et sur tous ceux dont il est chargé. Quant à ce qui suit : « Vous le mangerez en toute hâte », il faut le remarquer avec beaucoup plus de soin ; car il ne s’agit pas d’écouter les préceptes du Seigneur avec nonchalance, par manière d’acquit, et comme en passant ; il faut, au contraire, les confier à notre mémoire, avec un soin extrême et les accomplir pour le mieux et avec tout l’empressement possible ; car il est écrit : « Maudit soit celui qui fait négligemment l’œuvre de Dieu[1] ». Au sujet des Gentils convertis et de ceux qui cherchent très-avidement à goûter le pain du Verbe de Dieu, le Prophète dit ces paroles : « Ils ouvriront la bouche, comme le pauvre qui mange en secret[2] ».

8. Dès lors que nous célébrerons ainsi la pâque, notre Sauveur et Rédempteur se fera lui-même un vrai plaisir de prendre part à nos joies ; il daignera, pour notre plus grand bien, accorder à notre corps, c’est-à-dire à nous, son corps trois fois saint. Puisque nous sommes ici pour célébrer cette grande solennité de Pâques, prenons toutes les précautions précédemment indiquées : c’est par là que nous éviterons le malheur d’être privés des joies et des plaisirs du ciel. À quoi bon assister aux solennités de la terre, si, ce qu’à Dieu ne plaise, il nous arrivait d’être exclus des fêtes célébrées par les anges ? Tous les jours que nous fêtons ici-bas sont comme une image des réjouissances du ciel ; ils sont l’avant-goût du bonheur que les anges éprouvent dans l’éternité, non pas au retour annuel de certaines époques, mais continuellement, parce qu’ils sont établis pour toujours dans la condition d’un bonheur sans fin. Nous célébrons donc ici-bas la fête de Pâques et toutes les autres solennités, afin de tenir notre esprit en éveil et d’élever dès maintenant ses pensées vers les ineffables joies de la patrie éternelle : là, nous goûterons un bonheur plein et parfait, un bonheur que rien rie viendra troubler, parce qu’on n’y éprouve ni la crainte qui épouvante l’âme, ni les inquiétudes qui rongent le cœur ; le repos y est parfait, la sécurité y est entière, on y surabonde de délices. Là, nous dirons : Je vois notre Roi assis à la droite de la majesté de son Père. Alors nous pourrons avec confiance nous approcher du trône glorieux de Celui en la personne de qui nous verrons notre chair, désormais immortelle et déifiée, commander en maître aux vertus et aux puissances soumises à ses ordres. Car c’est Dieu lui-même, c’est le Fils de Dieu, c’est « Jésus-Christ homme, médiateur de Dieu et des hommes[3] », « qui est mort à cause de nos péchés, et qui est ressuscité pour notre justification[4] ». À lui avec le Père, dans l’unité de l’Esprit-Saint, appartiennent la louange et la bénédiction pendant les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

  1. Jer. 11, 8, 12
  2. Hab. 3, 14
  3. 1Ti. 2, 5
  4. Rom. 4, 25